Le coup de mou du début d'année s'est poursuivi d'avril à juin, avec une hausse de seulement 0,2% du Produit intérieur brut (PIB) d'un trimestre à l'autre, une augmentation identique à celle du premier trimestre, après un bond de 0,7% au dernier trimestre de 2017, a indiqué vendredi l'Insee dans sa première estimation.
Ce chiffre est inférieur aux attentes: le 19 juin, l'organisme public tablait encore sur une hausse du PIB de 0,3% au deuxième trimestre par rapport au précédent, tout comme la Banque de France (BdF).
Cette décélération sur la première partie de 2018 intervient après une année 2017 marquée par une croissance de 2,2% (2,3% en données corrigées des jours ouvrés) largement supérieure aux attentes.
Selon l'Insee, l'"acquis de croissance" pour l'année en cours - le niveau que le PIB atteindrait si l'activité stagnait d'ici la fin de l'année - est de 1,3%. L'organisme public prévoit 1,7% de croissance pour 2018, la BdF étant légèrement plus optimiste avec 1,8%, s'attendant à une accélération marquée sur la deuxième partie de l'année.
Après la légère hausse du chômage annoncée mercredi, le dernier chiffre de la croissance n'est pas une bonne nouvelle pour le gouvernement qui pourrait devoir revoir à la baisse son objectif de croissance de 2% pour l'année.
"Ce n'est plus jouable", a affirmé à l'AFP Philippe Waechter, économiste chez Natixis AM. "Pour y parvenir, il faudrait 1% de croissance au troisième et au quatrième trimestre", a-t-il expliqué, tablant sur une croissance annuelle autour de 1,5% seulement.
"L'objectif gouvernemental devient difficilement atteignable", a renchéri Mathieu Plane, économiste à l'OFCE, qui attend toutefois une accélération sur la deuxième partie de l'année.
Consommation en berne
La consommation est la principale responsable de ce coup de mou, les dépenses des ménages ayant fléchi de 0,1% au deuxième trimestre, contre une hausse de 0,2% au premier.
"C'est la vraie faiblesse. La consommation des ménages a été pénalisée par les effets fiscaux au premier trimestre", a assuré M. Waechter, en allusion à la hausse de la CSG et à celle des taxes sur l'essence. Ces mesures, associées à la hausse du pétrole, ont rogné le pouvoir d'achat des Français.
"Il y a un tassement de la croissance partout en Europe, mais en France il est beaucoup plus marqué qu'ailleurs. Il y a un choc spécifique", a ajouté M. Plane, pointant lui aussi du doigt la hausse de la fiscalité du début de l'année.
L'économiste s'attend à une amélioration en fin d'année avec la première réduction de la taxe d'habitation, en vue de sa suppression d'ici 2022 pour 80% des Français, mais qui arrivera trop tardivement pour donner une impulsion déterminante à la croissance en 2018. En octobre, interviendra également la deuxième phase de la suppression des cotisations salariales.
Avec une croissance inférieure aux attentes, "la vraie question devient désormais celle du respect de l'objectif gouvernemental de réduire le déficit à 2,3% cette année", a déclaré M. Waechter, qui pense qu'il restera autour de 2,6%, comme l'année dernière.
Selon lui, la marge de manœuvre de l'exécutif est faible: "Une augmentation des impôts renforcerait les problèmes et des mesures d'économies supplémentaires pourraient aussi affaiblir la demande. Du coup, il faudra laisser le déficit se creuser par rapport aux objectifs", a-t-il assuré.
Contrairement à la consommation, les investissements des entreprises, qui ont bénéficié ces dernières années de nombreuses mesures favorables de la part du gouvernement, ont accéléré avec une hausse de 1,1% d'un trimestre à l'autre, après 0,1% sur les trois premiers mois de l'année.
Le commerce extérieur a en revanche eu un impact négatif de 0,3 point sur le PIB, avec une accélération des importations de 1,7% au deuxième trimestre, contre un recul de 0,3% au premier, qui n'a été que partiellement compensé par un rebond des exportations de 0,6% après avoir cédé 0,4% en début d'année.
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