Le dernier bilan de cet accident sans précédent pour le Laos, qui mise sur le développement de nombreux barrages électriques pour satisfaire les appétits de ses voisins asiatiques, est de 27 morts.
L'eau a désormais atteint le Cambodge voisin, où "dix-sept villages ont été inondés à cause de l'effondrement du barrage au Laos", a déclaré à l'AFP Men Kong, porte-parole de la province cambodgienne de Stung Streng.
"Nous avons évacué 5.600 villageois car leurs maisons étaient submergées", a-t-il précisé, sans faire état de morts ou de disparus sur place. Les autorités cambodgiennes, qui organisent dimanche des élections législatives, s'attendent à une montée des eaux et à de nouvelles évacuations, après celles débutées mercredi.
Trois jours après le drame, sous de fortes pluies de mousson balayant le Laos, les sauveteurs, dont des renforts envoyés par la Chine, le Vietnam et la Thaïlande, étaient mobilisés, distribuant kits de secours et vivres.
Les routes ont été gravement endommagées, voire totalement emportées. Dans les villages laotiens où l'eau commençait jeudi à baisser, les habitants tentaient de sauver ce qui pouvait l'être, débarrassant les rues des cadavres d'animaux domestiques.
Mais la zone la plus touchée était interdite aux médias, a constaté une équipe de l'AFP sur place. Depuis que le drame s'est produit, lundi, le régime autoritaire laotien contrôle étroitement les informations.
"J'ai vu de nombreux corps... Il y avait des corps qui flottaient... Les autorités les ont ramassés mais ils n'ont pas emballé correctement les corps et c'était terrible", témoigne auprès de l'AFP Tran Thanh, un villageois d'une quarantaine d'années qui a réussi à fuir le village de Ban May.
Il assure que des villageois sont isolés, entourés par les eaux, sur une montagne proche du village, dans l'attente que les secours puissent les atteindre. "Les gens sont dans un piteux état. Vraiment, je ne sais pas comment ils vont réussir à surmonter cette épreuve. Ils ont tout perdu", a constaté sur place un médecin vietnamien requérant l'anonymat.
Trop tard
Le Premier ministre laotien, Thongloun Sisoulith, a attendu mercredi soir, soit deux jours après le drame, pour livrer le premier bilan humain officiel de la catastrophe du barrage de Xe-Namnoy.
Les rescapés, traumatisés, assuraient jeudi avoir été prévenus trop tard. "Personne ne nous a informés. Les habitants ont vu l'eau arriver et se sont mis à crier", accuse, comme d'autres habitants interrogés par l'AFP, Poosa Duangapai, réfugiée dans un abri collectif établi dans une école maternelle.
Elle a parcouru plusieurs kilomètres sur son petit tracteur, pour échapper aux eaux qui ont recouvert son village de Kok Kloy. "C'est tout ce qui me reste", ajoute-elle.
Lundi, "les autorités nous ont prévenus par haut parleur vers 16H00 que de l'eau allait être libérée... Nous n'avions pas conscience du risque d'effondrement du barrage", raconte Tran Van Bien, ouvrier agricole vietnamien qui a réussi à fuir la zone avec sa femme et son fils de cinq ans.
La structure qui s'est effondrée, "Saddle Dam D", fait partie d'un réseau de plusieurs barrages hydroélectriques. Ce projet de plus d'un milliard de dollars implique des entreprises laotiennes, thaïlandaises et sud-coréennes, regroupées au sein d'une co-entreprise, la Xe-Pian Xe-Namnoy Power Company's (PNPC).
Outre un avertissement tardif aux villageois, la polémique porte sur le fait que des dégâts, causés par des pluies très abondantes, avaient été repérés sur la structure plusieurs jours avant son effondrement, sans qu'aucune évacuation préventive soit ordonnée.
Or, un rapport de la société sud-coréenne Korea Western Power obtenu par l'AFP fait état d'un affaissement de 11 centimètres constaté dès vendredi dans le centre du barrage. "Il est encore trop tôt pour savoir s'il s'agit d'une catastrophe naturelle ou causée par l'homme", a déclaré à l'AFP un porte-parole de l'entreprise.
Plus de 50 projets hydroélectriques sont en cours de réalisation au Laos, un petit pays rural et montagneux enclavé au coeur de la péninsule indochinoise. Le Laos exporte la majeure partie de cette électricité, notamment vers la Chine, le Vietnam et la Thaïlande.
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