D'habitude enclins à ne pas critiquer leur président, les républicains ont rejoint les démocrates pour soutenir que la Russie, accusée d'ingérence dans l'élection de 2016, restait une menace à l'approche des élections parlementaires de novembre. Les élus répondaient au président qui, devant les caméras du monde entier, avait semblé exonérer son homologue russe à l'issue de leur tête-à-tête en Finlande.
Pour beaucoup, il venait de trahir les agences américaines du renseignement, unanimes à dénoncer une attaque coordonnée menée par le pouvoir russe contre le processus électoral américain.
"On s'est éloignés de la réalité", a réagi le sénateur républicain Ben Sasse, accusant M. Trump d'avoir cajolé un "voyou devenu despote russe" en ayant affirmé n'avoir "aucune raison" de croire à une ingérence de Moscou.
Le président américain a assuré avoir fait un lapsus, mais certains au Congrès poussent désormais pour reprendre la main et encadrer sa politique étrangère, après une séquence diplomatique houleuse la semaine dernière pendant laquelle Donald Trump s'en est pris directement à ses alliés de l'Otan et de l'Union européenne.
"Les digues lâchent, enfin", a lancé sur Twitter le républicain Bob Corker, président de la commission des Affaires étrangères du Sénat. "Il est temps pour le Congrès de passer à la vitesse supérieure et de reprendre nos prérogatives", a-t-il dit.
"Ne rien faire serait une faute politique", a renchéri Lindsey Graham, un sénateur républicain pourtant souvent en phase avec le milliardaire, estimant que l'ingérence russe "est un scénario du type 11-Septembre que nous pouvons vraiment empêcher."
Leur collègue Jeff Flake a déposé mercredi une proposition réaffirmant la conviction des services du renseignement sur une ingérence russe et assurant que Moscou serait tenu responsable de ses actions, mais sans aller plus loin.
Un ancien texte déposé par un autre sénateur républicain, Marco Rubio, est en train de revenir en force car il propose de sanctionner automatiquement la Russie en cas de nouvelle interférence dans les élections.
"L'inquiétude grandit"
Le chef de la majorité à la Chambre haute, Mitch McConnell, a laissé entendre mardi que le texte pourrait être soumis au vote.
Bob Corker et Jeff Flake ne brigueront pas de nouveau mandat en novembre et peuvent se permettre de critiquer ouvertement M. Trump, mais d'autres pourraient ne pas s'y risquer en se rappelant de Mark Sanford. Cet élu, auteur d'une diatribe anti-Trump, a subi les foudres présidentielles sur Twitter et a perdu la primaire républicaine de Caroline du Sud au profit d'un candidat loyaliste.
D'autant plus que, selon un sondage CBS News paru jeudi, 68% des électeurs républicains approuvent Donald Trump dans sa gestion du sommet d'Helsinki.
Mais les républicains ne disposent au Sénat que d'une courte majorité (51-49) et sans John McCain, qui lutte contre un cancer du cerveau, une seule voix discordante peut renverser un vote.
"Tout ce dont nous avons besoin, c'est d'une personne qui veut être du bon côté de l'Histoire", a affirmé au magazine Politico le sénateur démocrate Brian Schatz.
"Je pense que la vague d'inquiétude grandit" dans les deux grands partis, a dit à l'AFP le sénateur démocrate Richard Blumenthal.
Avec d'autres, il veut faire témoigner devant le Congrès l'interprète américaine qui accompagnait Donald Trump lors de son entretien avec M. Poutine, pour savoir ce qui s'est vraiment dit.
Les républicains préfèrent s'en remettre à une audition du secrétaire d'Etat Mike Pompeo et du conseiller à la sécurité nationale John Bolton, qui devraient avoir été informés du contenu des discussions.
De grands médias américains ont également appelé les républicains, majoritaires dans les deux chambres, à agir pour contenir Trump.
Dans un éditorial titré "Il est temps de redresser la tête", le New York Times a exhorté le Congrès à voter une motion de censure contre l'escapade finlandaise du président.
Même le plus conservateur Wall Street Journal a estimé que les élus devaient adopter une "stratégie de confinement" envers M. Trump pour "limiter sa marge de manoeuvre diplomatique".
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