"Aujourd'hui (mardi), c'était au tour de Monimbo, à Masaya, de retrouver des rues libres de tout blocus où les gens peuvent se déplacer librement", a déclaré le gouvernement nicaraguayen sur son site internet.
"Ce quartier historique célèbre sa liberté, après avoir été kidnappé par des terroristes financés par la droite putschiste", est-il ajouté.
L'Association nicaraguayenne des droits de l'Homme (ANPDH) a confirmé qu'après un "usage excessif de la force" contre les manifestants, la police et les groupes armés irréguliers avaient pris le contrôle de la ville, a déclaré à l'AFP son dirigeant Alvaro Leiva.
Un millier d'hommes des forces anti-émeutes et de paramilitaires fortement armés à bord d'une quarantaine de pick-up étaient entrés au petit matin dans Masaya, situé à une trentaine de kilomètres de la capitale Managua.
Au moins deux personnes ont été tuées dans l'assaut, "une femme âgée et un policier", a déclaré à l'AFP la présidente du Centre nicaraguayen des droits de l'Homme (Cenidh), Vilma Núñez.
"Une chasse sans discrimination a été lancée contre le peuple, il y a des raids sur les maisons, ils enfoncent les portes, ils jettent les gens et leurs affaires dans la rue", avait-elle dénoncé.
Les accès à la ville avaient étaient bloqués et les journalistes empêchés de passer: visée par les tirs, une équipe de l'AFP a été contrainte de faire demi-tour aux abords de la ville.
"Ils attaquent Monimbo! Les balles atteignent l'église Maria Magdalena, où le prêtre s'est réfugié", avait écrit sur Twitter l'évêque auxiliaire de Managua, Silvio Baez, appelant le président nicaraguayen Daniel Ortega à "arrêter ce massacre".
Sur les vidéos et enregistrements publiés sur les réseaux sociaux, on peut entendre des tirs nourris et des cris. Des habitants et des journalistes locaux ont rapporté la présence d'hommes cagoulés équipés de fusils d'assaut Kalachnikov et M16, ainsi que de tireurs d'élite.
"Opération nettoyage"
Cette incursion, rebaptisée par l'opposition "opération nettoyage", ciblait le quartier indigène de Monimbo, où la population est fortement mobilisée contre le gouvernement. Des barricades allant jusqu'à deux mètres ont été élevées dans cette ville de 100.000 habitants.
"On nous attaque avec des armes lourdes, c'est une des opérations les plus violentes lancées contre Masaya, on entend des détonations et des tirs de mitrailleuses", avait déclaré à l'AFP le dirigeant du mouvement étudiant du "19 avril", Cristian Fajardo.
Dans une vidéo tournée au milieu de l'attaque, les jeunes du quartier de Monimbo se disaient prêts à mourir pour un "Nicaragua libre". "Nous n'allons pas les laisser entrer ici, si nous devons mourir pour notre pays, nous allons mourir".
La vice-présidente Rosario Murillo, également épouse du chef de l'Etat, avait célébré plus tôt l'avancée de la "libération" de la ville rebelle, estimant que les manifestants étaient "une minorité remplie de haine".
"La bonne nouvelle en provenance du Nicaragua est que le coup d'État a échoué, c'est-à-dire que la tentative de coup d'Etat au Nicaragua est déjà vaincue", a affirmé mardi à Bruxelles Paul Oquist, le ministre nicaraguayen chargé des politiques nationales, dans un entretien à l'AFP.
"Il n'y a plus de barrages routiers", "les étudiants peuvent retourner en cours", a-t-il soutenu. Le gouvernement qualifie les manifestants de "putschistes" et de "délinquants".
Pendant ce temps, le Parlement, contrôlé par le camp au pouvoir, a adopté une loi punissant de 15 à 20 ans de prison les actes de terrorisme. Sont notamment ciblés les auteurs d'actes visant à "altérer l'ordre constitutionnel", ce qui, selon l'opposition, pourrait concerner les manifestants.
Le leader paysan Medardo Mairena, l'un des représentants de l'opposition dans le dialogue avec le gouvernement, a été accusé mardi à Managua de terrorisme, crime organisé, assassinat et tentative de saper l'ordre constitutionnel du pays, ont annoncé des sources judiciaires.
Les affrontements à Masaya interviennent au moment où la communauté internationale réclame avec insistance l'arrêt de la répression.
Les Etats-Unis ont "fermement" exhorté mardi le président du Nicaragua à cesser "la violence et le bain de sang".
L'Union européenne a aussi demandé mardi la "fin immédiate" de la violence au Nicaragua et exigé le démantèlement des groupes armés irréguliers. La veille, 13 pays d'Amérique latine et l'ONU avaient réclamé la cessation immédiate des violences.
Le Nicaragua, pays le plus pauvre d'Amérique centrale, est secoué depuis trois mois par des violences qui ont fait plus de 280 morts et quelque 2.000 blessés.
Un mouvement de protestation, dont les étudiants sont le fer de lance, a été lancé le 18 avril contre le gouvernement de Daniel Ortega, ex-guérillero de 72 ans, à la tête du Nicaragua depuis 2007 après l'avoir déjà dirigé de 1979 à 1990.
Il est accusé d'avoir mis en place avec son épouse Rosario Murillo, une "dictature" marquée par la corruption et le népotisme. Ses adversaires demandent des élections anticipées ou son départ.
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