Officiellement, il ne devait être question de rien d'autre que le thème annoncé ("Europe, cohésion et territoires") lors de ce rendez-vous semestriel instauré par le président Emmanuel Macron et placé sous l'égide de Matignon.
Mais les dissensions latentes entre l'exécutif et les territoires se sont évidemment invitées au menu de cette 3e édition, marquée par le boycott de trois associations d'élus : Régions de France, l'Assemblée des départements (ADF) et l'Association des maires (AMF).
Dans son discours d'ouverture, Édouard Philippe a bien tenté de jouer l'apaisement en vantant un "lien partenarial", symbolisé par les contrats financiers qui encadrent la hausse de la dépense de 322 grandes collectivités.
"Je suis intimement convaincu que" ces contrats sont "infiniment plus féconds et plus respectueux qu'une diminution brutale et non discutée des dotations", a assuré le Premier ministre. Tout juste a-t-il reconnu que leur "principe même" avait pu susciter "un peu d'agacement et de désaccord".
"Au fur et à mesure, nous nous améliorerons collectivement pour, peut-être dans les années qui viennent, prendre mieux en compte telle ou telle spécificité de telle ou telle collectivité", a-t-il encore insisté.
Cependant, il avait un peu plus tôt entendu en petit comité, lors de la réunion de "l'instance de dialogue", un plaidoyer en forme de sermon du président (LR) du Sénat Gérard Larcher. "Je crois qu'il faut se poser collectivement la question de la méthode de travail et s'interroger sur les conditions d'un dialogue sincère", a déclaré M. Larcher, selon un texte que l'AFP s'est procuré.
"Bourgeois de Calais"
"Les conditions de l'exercice n'ont toujours pas permis aux collectivités de se sentir réellement entendues", a-t-il poursuivi, en affirmant que "le retrait des trois associations généralistes de la Conférence nationale des territoires ne peut pas être pris à la légère". "Traiter leur absence par l'indifférence, en attendant que ces associations reviennent, tels les +Bourgeois de Calais+, constituerait à nos yeux une profonde erreur", a-t-il estimé.
Quant aux contats financiers, si près de 230 collectivités les ont signés, certaines "ont un peu senti qu'on leur mettait l'épée dans les reins".
Exploitant depuis plusieurs mois le créneau d'une supposée déconnexion de l'exécutif avec les territoires, des députés LR se sont greffés à l'offensive de M. Larcher, comme Guillaume Peltier et Annie Genevard qui ont laissé leur siège vide jeudi, quand Robin Reda dénonçait le "racisme territorial" du gouvernement.
"Nous disons à celles et ceux qui n'ont pas voulu venir, à ceux qui ont pris cette décision pour des positions que l'on doit respecter, mais qui sont parfois de nature très politique, que la porte est ouverte", a répondu le secrétaire d'État Olivier Dussopt.
L'absence des régions a été d'autant plus préjudiciable qu'elles sont les principales délégataires de la gestion des fonds européens de cohésion, thème central de la journée. Dans ces conditions, difficile de jeter les bases d'une position commune, alors que se prépare le budget communautaire 2021-2027, soit environ 18 milliards d'euros pour la France.
"Il n'est jamais bon que des messages divergents émanent de notre pays", même si "ça n'exclut pas de discuter", a souligné le ministre de la Cohésion des territoires Jacques Mézard.
"Je n'ai pas de doute sur le fait que les régions viendront discuter, ce n'est pas possible autrement. Les uns et les autres sont liés", a pour sa part assuré la ministre Jacqueline Gourault.
"Il n'y a de la part des régions aucune posture politique. Comme le chef de l'État, nous ne voulons que le redressement du pays", a réagi Régions de France dans un communiqué.
Sans les régions, les associations d'élus présentes, comme Villes de France, l'Association des petites villes (APVF) ou France Urbaine, ont plaidé pour être davantage associées localement à la stratégie et au pilotage des fonds, via les préfets ou au niveau des métropoles.
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