"Je n'ai jamais vécu une audience comme celle-là", assure Me Élise Brand, avocate des salariés de l'abattoir AIM de Sainte-Cécile (Manche), dont la liquidation judiciaire a été prononcée mercredi 4 juillet 2018 par le tribunal de commerce de Rouen (Seine-Maritime).
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Selon l'avocate, il avait été demandé aux salariés d'AIM, qui emploie 235 personnes, de travailler, la veille, sur l'offre de cession. "Ce matin, à l'audience, aucun interlocuteur n'a osé nous dire que l'offre avait été retirée", poursuit Me Brand. Une trentaine de salariés étaient à l'audience, "ils se sont effondrés".
Pas de financement
Les candidats à la reprise envisageaient d'acheter le porc plus cher que le prix du marché, pour mieux payer les producteurs. Selon l'avocate, la BPI acceptait de financer la moitié du projet, à hauteur de 2,5 millions d'euros, à condition qu'une banque finance le reste. "Personne ne leur a ouvert la porte". "Ce modèle économique déplaît aux grands acteurs de l'abattage", estime Me Brand, pour qui "les éleveurs ont reçu des pressions pour retirer leur offre".
Un dossier symbolique
Les quinze prochains jours seront consacrés à préparer le Plan de sauvegarde de l'emploi. Me Brand n'exclut pas, par la suite, d'autres procédures judiciaires. Elle met en cause le rôle de la SEM Imagine (45 % département de la Manche, 45 % région Normandie et 10 % Caisse des dépôts et consignations), actionnaire et propriétaire des bâtiments. "Nous estimons que la SEM a imposé des décisions de gestion qui ont conduit à la liquidation judiciaire. Nous allons rechercher sa responsabilité civile et pécuniaire", déclare l'avocate, qui n'exclut pas d'engager une procédure pénale. Elle voit en AIM un dossier symbolique, "à la fois pour la préservation de l'emploi et le modèle d'agriculture que l'on veut adopter en France".
Me Brand sur AIM
"La SEM a fait tous ce qu'elle a pu"
Pour la SEM Imagine, "il n'y avait pas de pire décision" que la liquidation, assure son avocat Me Grégory Berkovicz. "C'est une situation déplorable sur le plan social". Sur le plan économique, "la SEM a investi 8 millions d'euros, et se retrouve avec des bâtiments vides".
Il assure que "la SEM avait fait tous les efforts, elle était prête à céder ses actions à 1€ symbolique pour que les repreneurs puissent posséder les bâtiments". Il souligne cependant que "les loyers n'ont jamais été payés, il y avait des dettes de charges sociales, d'emprunts à l'État, etc.". Une situation qui pourrait expliquer que l'offre ne soit pas financée, estime l'avocat, qui invite à "ne pas faire de politique".
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