"C'est une émotion indescriptible. Faites arriver le cri d'amour qui vient de Pontida", a lancé Matteo Salvini devant des milliers de sympathisants qui l'acclamaient.
"Je pense à une Ligue des Ligues en Europe, qui unisse tous les mouvements libres qui veulent défendre leurs frontières et le bien être de leurs enfants", a-t-il ajouté sur une grande scène où figuraient les slogans "Le bon sens au gouvernement" et "Les Italiens d'abord", leitmotiv du chef de file du parti eurosceptique.
Plus tôt, il avait annoncé que les élections européennes de 2019 seraient "un référendum entre l'élite, le monde de la finance et celui du travail réel, entre une Europe sans frontières avec une immigration de masse et une Europe qui protège ses citoyens".
Selon les médias, quelque 50.000 personnes étaient venues de toute l'Italie pour cette grand-messe, événement central dans la liturgie du mouvement d'extrême droite car c'est à Pontida, près de Bergame, que serait née en 1167 la Ligue lombarde, alliance de villes du nord contre l'empereur Frédéric Barberousse.
Sur des stands représentant les régions de la péninsule étaient vendus des T-shirts à l'effigie de Matteo Salvini avec le slogan "La belle vie, c'est ultra-fini", en référence aux récents propos du chef de la Ligue qui avait déclaré que "pour les migrants clandestins, la belle vie c'est fini".
'C'est le ministre qui décide'
Fort du double portefeuille de vice-Premier ministre et ministre de l'Intérieur, dont il est titulaire depuis un mois, Matteo Salvini a réussi à imposer le thème des migrants à l'agenda européen en interdisant début juin l'accès aux ports italiens aux ONG portant secours aux migrants en Méditerranée. Il les accuse d'être les complices des passeurs, ce qu'elles contestent avec virulence.
"La décision d'ouvrir les ports ou de les fermer, c'est le ministre de l'Intérieur qui la prend", a-t-il martelé dimanche.
Sa décision de fermer les ports aux ONG est à l'origine de tensions diplomatiques avec la France, cette dernière accusant l'Italie "d'irresponsabilité" et M. Salvini rétorquant que l'Italie n'avait pas de leçons à recevoir de la part d'un pays qui n'a pas tenu ses engagements en matière d'accueil.
Si les relations ont semblé se réchauffer ces derniers jours entre les deux voisins, à la faveur de rencontres entre le chef du gouvernement italien Giuseppe Conte et le président français Emmanuel Macron, Matteo Salvini ne change pas de ton pour autant.
Avec son style sans nuances, il a conseillé vendredi à Emmanuel Macron de "se laver la bouche parce que l'Italie à fait beaucoup plus que les Français qui continuent de repousser des personnes à Vintimille", à la frontière franco-italienne.
'Stratégie de communication'
Une ligne dure qui semble lui réussir selon les sondages, dont un récent, réalisé mi-juin par Ipsos, a montré qu'une majorité d'Italiens (59%) approuvaient ses choix en matière d'immigration.
Une large adhésion dont la Ligue, alliée du Rassemblement national de Marine Le Pen en France, tire tout naturellement avantage: arrivée au pouvoir aux législatives du 4 mars avec 17% des voix (en troisième position), elle était créditée samedi de 31,2% des intentions de votes, faisant du mouvement eurosceptique le premier parti d'Italie.
Le parti dame le pion à son allié de la coalition gouvernementale, le Mouvement 5 Etoiles (M5S, antisystème), arrivé en tête des élections et qui reste stable à environ 30%.
"C'est le moment de la Ligue et sa force dépend surtout de la solide continuité de la stratégie de communication de Matteo Salvini par rapport à la campagne électorale, une stratégie basée sur un choix précis des thèmes sensibles (migrants, responsabilité de l'Europe)", écrivait samedi le Corriere della Sera.
Pourtant grand vainqueur des législatives, Luigi Di Maio, le chef de file du M5S, devenu lui aussi vice-Premier ministre (et ministre de Travail), a été éclipsé par son allié de la Ligue, les thématiques sociales portées par le M5S (comme le revenu de citoyenneté) étant reléguées au second plan.
Arrivé aux commandes de la Ligue en 2013, Matteo Salvini a repris un parti sécessionniste au bord du gouffre (il était à 4% des voix) et l'a transformé en une formation nationaliste ayant le vent en poupe, recueillant des voix du nord, son fief historique, mais aussi au sud de la péninsule.
as/fio/pg
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