Lors d'une réunion, mercredi soir, à Valenciennes, l'ancien ministre de la Ville a fait part de son "sentiment": "on est en train de remplacer le vieux monde des solidarités par le jeune monde des abandons de ceux qui ont besoin de la solidarité", a lâché celui qui fut pourtant un soutien du candidat Macron, dans une intervention diffusée sur RTL.
A son endroit et celui du gouvernement, il dénonce aujourd'hui "la vision de la société" "inefficace et dangereuse", une charge aussi virulente que l'affront que l'ancien député du Nord a subi ces derniers jours, après l'enterrement par l'exécutif de son rapport sur les banlieues.
Le père de la politique de rénovation urbaine des quartiers dans les années 2000, figure populaire de la classe politique mais toujours vu avec une certaine méfiance par ses congénères, avait dès l'automne fait une offre de service au nouveau président Macron.
Ce dernier lui avait alors confié une mission sur les quartiers prioritaires de la ville et, ses proches l'assuraient, "il a repris du poil de la bête". Macron? "Jean-Louis est d'accord avec lui en ce qu'il entraîne le pays".
Las: deux mois plus tard, c'est non pas Emmanuel Macron mais Édouard Philippe qui, entre deux rendez-vous, réceptionnait en catimini les conclusions de son rapport, laissant augurer le sort de la soixantaine de pages de préconisations de l'ancien ministre de Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy.
Le 22 mai, le président de la République portait le coup fatal: "Que deux mâles blancs ne vivant pas dans ces quartiers s'échangent l'un un rapport, l'autre disant +on m'a remis un plan+... Ce n'est pas vrai. Cela ne marche plus comme ça".
"Gratin de nouilles"
A l'humiliation, dont il ne disconvenait pas en privé, Jean-Louis Borloo avait opposé un satisfecit de façade, jurant avoir retrouvé dans les annonces présidentielles une part de ses propositions.
L'un de ses proches décryptait: "la plupart des gouvernants ont la trouille du dialogue avec les banlieues: il y a une forme de paranoïa, une défiance généralisée dans les élites", alors qu'à l'Élysée, on raillait précisément un rapport "très identifié à une politique des années 90".
Dans la majorité, l'ancien maire de Valenciennes, arrivé sur le tard à la politique après une fructueuse carrière d'avocat d'affaires, compte d'ailleurs autant de soutiens que de contempteurs: "il pense qu'il n'y a que lui qui connaît la banlieue", fustige une ministre, quand un ténor de la majorité met a contrario en exergue un "spécialiste" qui répond "à une attente très forte, de l'impatience même".
Mercredi, Jean-Louis Borloo, qui affirme ne plus être en politique, est sorti de sa réserve: "Si on parlait cuisine, il faut faire attention que notre pays ne se retrouve pas dans la situation culinaire désagréable où le gratin se sépare des nouilles", a-t-il lancé.
"C'est le problème d'une monarchie qui en fait n'a plus de moyens, et ce qui me dérange, c'est que les quelques moyens qu'elle a, elle a décidé d'arbitrer pour permettre à ceux qui courent le plus vite de courir de plus en plus vite", a-t-il encore fustigé.
La sortie a autant surpris qu'agacé la majorité: "Ceux qui sont aux responsabilités depuis 30 ans sont-ils les mieux placés pour nous expliquer ce qu'ils n'ont pas fait et que nous devrions faire ?", a interrogé jeudi matin sur LCI le délégué général de La République en marche, Christophe Castaner.
Quelques heures plus tard, Jean-Louis Borloo a voulu minimiser: il ne pointait du doigt qu'"une vision globale sur les élites", son propos "ne s'adressait pas au gouvernement ou au président", a-t-il indiqué au Figaro.
"À force de parler de populisme pour ne pas entendre qu'il y a un sujet, on se dédouane à bon compte", a-t-il ajouté. "Je ressens un divorce entre une vision des sociétés qui est celle des élites européennes".
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