Au petit "jeu" du temps d'attente le plus long pour obtenir un rendez-vous, une spécialité fait la course en tête : l'ophtalmologie. Pour se faire une idée précise, il a fallu appeler une douzaine de cabinets à Caen (Calvados). Beaucoup ne prennent aucun nouveau patient. D'autres proposent de rappeler en début d'année prochaine pour espérer avoir un rendez-vous. Parmi ceux qui acceptaient les rendez-vous : deux en proposaient un dans les trois mois (ils viennent de s'installer), il aurait fallu attendre au minimum six mois pour trois de leurs confrères, tandis qu'une autre ophtalmologue proposait un rendez-vous pour septembre… 2019 ! Même l'application Doctolib, qui organise les emplois du temps des praticiens et permet un accès plus facile aux rendez-vous, botte en touche.
Gagner en temps et en proximité
"On est dans une zone rouge pour l'ophtalmologie", confirme Karine Hauchard, responsable de projets télémédecine et directrice adjointe du groupement de coordination sanitaire. "Ici, on met en place des solutions techniques pour raccorder les patients avec leurs médecins, mais aussi pour faire gagner du temps et de la proximité."
Concrètement, la télé-médecine (des services de communication modernes et sécurisés entre le patient et son médecin) pourrait bien réduire les temps d'attentes, et faciliter l'accès aux soins des personnes en désert médical ou en EPHAD. "Le tout récent protocole Muraine (mis en place le mercredi 11 avril 2018) permet de décharger les ophtalmologues en confiant aux orthoptistes une partie de leur travail, pour les corrections de lunettes par exemple". "On surveille ces solutions de très près" acquiesce Christophe Kassel, directeur général du CHU de Caen. "Pour être honnête, nous venons de recruter un chef de service en ophtalmologie, et il a fait part dès son entretien d'embauche de son désir de travailler avec ce protocole", confie le directeur.
Pas de solution miracle
Avec ce protocole, les spécialistes peuvent se concentrer sur les actes médicaux complexes, en confiant les actes plus simples à du personnel de santé qualifié. "Attention, on n'est pas dans l'ubérisation de la médecine, bien au contraire. Il y aura toujours un médecin derrière le choix et la responsabilité médicale en amont".
Anne-Laure Lux, praticien hospitalier ophtalmologue au CHU de Caen, tempère les avancées du protocole : "C'est intéressant et ça va dans le bon sens, mais je ne suis pas persuadée que cette "solution miracle" va nous faire gagner beaucoup de temps. Pour une raison toute simple : faire un fond d'œil, ça prend cinq minutes. Donc même en recevant directement les images, combien de temps je peux gagner sur cinq minutes ? Quelques secondes." Pour gagner du temps, elle mise plus sur le personnel humain : "J'ai des internes en ophtalmologie qui comptent s'installer à Caen. Eux vont désengorger les cabinets des autres médecins."
Frottis, acupuncture, vaccins et hypnose
Symbole d'un réinvestissement des ressources humaines, Virginie Haziza, fût l'une des premières sages-femmes formée aux consultations gynécologiques. Ce cadre sage-femme au CHU de Caen, explique les conséquences de la réforme de 2009 qui a permis à ses homologues d'augmenter le nombre d'actes médicaux pratiqués : " Après les formations correspondantes, nous avons le droit de faire un suivi gynécologique de femme en bonne santé, mais pas seulement : on peut faire les frottis, 11 vaccins, aider les femmes enceintes à arrêter de fumer, faire des séances d'acupuncture ou même de l'hypnose pour calmer les femmes qui en ressentent le besoin". "C'est important pour certaines jeunes femmes de pouvoir faire leur examen gynécologique avec nous, on est peut-être moins impressionnantes que les gynécologues, en tout cas ça les rassure", sourit-elle. Les sages-femmes peuvent décharger les gynécologues d'une partie de leur travail pour les femmes en bonne santé parce qu'elles sont responsables leurs actes : elles ont passé le concours de la première année commune des études de santé et sont une "profession médicale à responsabilité limitée". "Pour réduire les temps d'attentes, nous avons mis en place des consultations à court terme, si vous appelez le mercredi matin, nous gardons dix consultations libres pour l'après-midi".
Autre solution mise en avant par le directeur du CHU, l'amélioration de la stratégie de consultation : "Nous avons 15 % de non-venue, pour corriger cela, on a mis en place un système de rappel par sms depuis le début de l'année". La réduction des temps d'attente arrive donc… doucement.
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