Selon des sources gouvernementales citées par les médias italiens, et confirmées ensuite par un porte-parole italien à l'AFP, les deux hommes ont eu un long entretien dans un restaurant au cours duquel ils ont évoqué le dossier des migrants, à l'avant-veille d'un sommet européen largement consacré à cette question. L'Elysée n'avait pour l'instant pas confirmé.
Le président Macron, éduqué dans un lycée jésuite, et le pape argentin, de l'ordre des Jésuites, ont parlé de la laïcité, du dialogue interreligieux, du changement climatique, ainsi que de "sujets sociétaux", a précisé la présidence française, évoquant un "échange très libre et très intense".
M. Macron est ressorti du palais pontifical au bout de 57 minutes, le plus long entretien jamais accordé par le pape argentin à un chef d'Etat ou de gouvernement.
Il a été rejoint à la fin de son entretien privé par son épouse Brigitte, en strict tailleur noir, ainsi que par une délégation dont son ministre de l'Intérieur Gérard Collomb, chargé des cultes, et celui des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian. "Les Bretons, c'est la mafia française", a-t-il plaisanté en le lui présentant.
Le président français a offert au pape une édition en italien de 1949 du "Journal d'un curé de campagne" de Georges Bernanos, écrivain catholique fervent, que son hôte apprécie beaucoup.
Le pape lui a remis une médaille de Saint Martin, qui selon la tradition chrétienne a partagé son manteau avec un déshérité. "C'est la vocation des gouvernants de protéger les pauvres... e tutti siamo poveri" (et nous sommes tous des pauvres), lui a fait remarquer François avec un regard appuyé.
Le pape, qui a fait de l'accueil des migrants une priorité, interpelle régulièrement les dirigeants de l'UE pour qu'ils maintiennent des idéaux fondateurs comme "la solidarité".
Le président français à posé la main sur l'épaule du pape dans un geste étonnamment complice et les deux hommes se sont embrassés sur les deux joues.
Avant cette rencontre, Emmanuel Macron avait pris son petit-déjeuner avec la communauté de laïcs catholiques Sant'Egidio, qui organise des "couloirs humanitaires" acheminant des réfugiés syriens en Europe dont la France. Pour Emmanuel Macron, c'est un "modèle de politique d'immigration légale", a commenté Andrea Riccardi, fondateur de Sant'Egidio.
Cierges et laïcité
Emmanuel Macron a ensuite assisté à une cérémonie religieuse dans la basilique de Saint-Jean-de-Latran pour recevoir son titre de "premier et unique chanoine d'honneur" de la cathédrale, une tradition remontant au roi Henri IV. Son prédécesseur François Hollande s'était abstenu de ce cérémonial.
"Mon émotion est réelle", a déclaré le chef de l'Etat dans une allocution de quelques minutes, après avoir lentement remonté la nef, précédé de dignitaires ecclésiastiques et d'enfants de choeur portant de grands cierges.
La cérémonie a débuté par une lecture et un Pater Noster en latin, l'archiprêtre Angelo De Donatis appelant à la "défense de la dignité humaine" et mentionné les "yeux désespérés des migrants".
Le président français a pris la parole à son tour, justifiant son choix de participer à cette cérémonie au nom de la "tradition de concorde et d'amitié entre la France et le Vatican".
Mais devant la communauté catholique française, il a longuement défendu sa propre vision de la laïcité, contestant l'idée de "cacher" les religions car la croyance est selon lui "partout" dans la société et dont on a "besoin".
"La laïcité ce ne serait pas une pudibonderie contemporaine qui consisterait à dire +cachez cette religions, cette croyance que je ne saurais voir+. Elle est partout dans la société". Il a aussi insisté sur "le lien particulier de la France avec l'Eglise catholique".
Début avril, Emmanuel Macron avait dit vouloir "réparer" le "lien" entre l'Église catholique et la République française, "abîmé" notamment depuis l'adoption du mariage homosexuel en 2013. Ce discours avait suscité les critiques de la gauche, qui dénonçait une atteinte à la laïcité.
Il a aussi parlé des migrants, "un défi politique et une crise pour l'Europe" qui ""ne se résout ni dans la dilution absolue de ce que nous sommes ni dans un rejet absolu".
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