Le Lifeline, affrêté par l'ONG allemande du même nom, reste bloqué en mer, le ministre italien de l'Intérieur Matteo Salvini ayant confirmé lundi sa ligne dure à l'encontre des ONG venant en aide aux migrants.
Le cargo danois Alexander Maersk est arrivé dans la nuit à Pozzallo, après trois jours d'attente devant ce port du sud de la Sicile. Il avait changé de route vendredi matin pour se porter au secours de migrants au large de la Libye.
Un représentant de la compagnie, Palle Laursen, a salué le "travail héroïque de l'équipage", ajoutant que Maersk se sentait "très fière" de son action.
Lors d'une conférence de presse à son retour d'un déplacement en Libye, M. Salvini a répété que le Lifeline et les 234 migrants se trouvant à son bord, ne seraient pas autorisés à accoster en Italie.
Il a au passage égratigné une nouvelle fois la France, jugeant que son président Emmanuel Macron était "proportionnellement 15 fois plus méchant" que le Premier ministre hongrois Viktor Orban, dans son refus de respecter les quotas de réallocation de migrants en Europe.
Le président nationaliste de l'Assemblée de Corse, Jean-Guy Talamoni, s'est dit lundi "disposé à porter secours" aux migrants recueillis sur le Lifeline. Il a toutefois ajouté sur la radio France Inter que "juridiquement, il faut évidemment l'accord de l'Etat (français) pour que les choses se fassent".
Visage fermé
La situation reste difficile en Méditerranée après un weekend où près de 1.000 migrants ont été secourus pour la seule journée de dimanche au large de la Libye. Des images prises au moment de leur débarquement à Tripoli, montrent des centaines d'entre eux, hommes, femmes et enfants, tête baissée ou le visage fermé, visiblement exténués, loin des sourires qu'ils affichent d'ordinaire sur les bateaux qui les transportent vers l'Italie.
M. Salvini, parti en guerre contre les ONG qui viennent en aide aux migrants au large des côtes libyennes, a jugé lundi qu'elles étaient "consciemment ou inconsciemment les complices" des trafiquants d'êtres humains en Libye, et qu'il n'était donc pas souhaitable à ses yeux qu'elles continuent leurs opérations en Méditerranée.
Deux autres navires humanitaires, l'Aquarius des ONG françaises SOS Méditerranée et Médecins sans frontières (MSF) et l'Open Arms de l'ONG espagnole Pro Activa, se trouvaient lundi au large de la Libye mais sans possibilité d'intervenir, faute de demande en ce sens de la part des garde-côtes libyens.
Car, ce sont eux désormais qui ont la haute main sur les opérations de secours au large de la Libye, les autorités maritimes italiennes, qui assuraient jusqu'à ce week-end la coordination principale de ces sauvetages, leur ayant cédé cette responsabilité.
"Centres d'accueil" en Libye?
M. Salvini, qui s'est rapidement imposé comme l'homme fort du nouveau gouvernement italien, a effectué lundi une visite éclair à Tripoli où il a rencontré le vice-Premier ministre libyen du Gouvernement d'union nationale (GNA) Ahmed Meitig, et remercié les garde-côtes libyens.
Au cours d'une conférence de presse commune, M. Salvini, qui est aussi le patron de la Ligue (extrême droite), a indiqué que l'Italie allait proposer l'installation de "centres d'accueil et d'identification" au sud de la Libye lors du sommet de l'Union européenne jeudi à Bruxelles.
"Nous soutiendrons, d'un commun accord avec les autorités libyennes, la mise en place de centres d'accueil et d'identification (de migrants) au sud de la Libye, à sa frontière externe, pour l'aider autant que l'Italie à bloquer la migration", a déclaré M. Salvini.
M. Meitig a pour sa part indiqué que son pays refusait "catégoriquement l'installation de camps pour migrants en Libye". M. Salvini a pris acte et annoncé lundi soir à Rome qu'une mission technique serait mise sur pied dès cette semaine avec la participation de l'Italie, du Niger, du Tchad et du Mali.
La crise migratoire devrait par ailleurs figurer au menu des discussions mardi au Vatican entre le pape François - qui multiplie les appels à la "solidarité" - et le président français Emmanuel Macron - à couteaux tirés sur ce dossier avec le nouveau gouvernement italien.
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