M. Erdogan, 64 ans, dirige la Turquie depuis 2003, d'abord en tant que Premier ministre puis en tant que président depuis 2014.
Il l'a transformée à coups de projets de développements et en mettant en oeuvre des politiques tournées vers la croissance économique, tout en libérant le champ d'expression religieuse dans ce pays musulman et en s'imposant comme un acteur-clef sur la scène internationale.
Le chef d'Etat a bousculé le calendrier politique en annonçant en avril que les élections prévues initialement le 3 novembre 2019 seraient avancées au 24 juin, certainement motivé par la crainte d'une crise économique qui pointe son nez avec une chute vertigineuse de la livre turque, une inflation à deux chiffres et un important déficit des comptes courants.
L'enjeu des ces élections est considérable car le vainqueur sera doté de pouvoirs renforcés adoptés à la demande de M. Erdogan par référendum en avril 2017, moins d'un an après avoir échappé à une tentative de coup d'Etat mené par des militaires factieux en juillet 2016.
L'indétrônable président turc a dû affronter dans cette campagne expresse une union inattendue des partis d'opposition et un concurrent, Muharrem Ince (CHP, social-démocrate), capable de rivaliser avec lui.
Si le président sortant semble être le favori de la présidentielle, il pourrait selon de nombreux observateurs ne pas obtenir les plus de 50% des voix nécessaires pour l'emporter dès le premier tour et son parti, l'AKP, pourrait perdre sa majorité au parlement.
'Nouvelle énergie'
La "nouvelle énergie" de l'opposition lui a permis d'orienter le débat pendant la campagne, ce qui est "une première", selon Asli Aydintasbas, experte au Conseil européen des relations internationales.
Cela a par exemple conduit M. Erdogan à promettre, après que d'autres candidats l'aient fait, la levée de l'état d'urgence en vigueur depuis le putsch manqué.
L'unité de l'opposition s'explique en partie par la victoire serrée du oui au référendum sur la révision constitutionnelle élargissant les pouvoirs présidentiels, remporté à 51,4% des voix.
"Ce résultat montre un vote solide de l'opposition qui peut être qualifié de vote anti-Erdogan", explique Mme Aydintasbas. "Il était donc naturel pour l'opposition de s'unir pour consolider ce vote anti-Erdogan".
Pour Elise Massicard, chercheuse au CNRS et au CERI/Sciences Po, cela s'explique aussi par le système présidentiel à venir et la volonté de "ne pas laisser la concentration des pouvoirs à M. Erdogan et à l'AKP".
Si les différentes formations de l'opposition ont décidé de présenter leurs propres candidats à la présidentielle, la plupart se sont accordées pour soutenir le candidat qui arriverait à un éventuel second tour face à M. Erdogan le 8 juillet.
Par ailleurs, face à l'alliance composée par l'AKP et les ultranationalistes du MHP, plusieurs partis d'opposition, dont le CHP et une nouvelle formation de la droite nationaliste, le Bon Parti dirigé par l'ancienne ministre de l'Intérieur Meral Aksener, se sont alliés pour les législatives.
"L'idée de la présidentialisation c'est de sortir renforcé, mais si (M. Erdogan) n'obtient pas la majorité au parlement, politiquement ce n'est pas du tout un renforcement", selon Mme Massicard.
'Rythme naturel'
Face à la mainmise du gouvernement sur les principaux médias, certains candidats et partis de l'opposition, absents des ondes et des unes des journaux, ont rivalisé d'ingéniosité pour se faire entendre, notamment sur les réseaux sociaux.
Selahattin Demirtas, candidat du parti prokurde HDP, a ainsi dû faire campagne depuis une cellule de prison, où il est en détention préventive depuis novembre 2016, accusé d'activités "terroristes".
Dénonçant une incarcération "politique", M. Demirtas a fait campagne à travers les réseaux sociaux par l'intermédiaire de ses avocats, et a mis à profit un appel téléphonique autorisé avec son épouse pour tenir, via le haut-parleur du téléphone, une sorte de "meeting", filmé et diffusé par le parti.
Selon Mme Aydintasbas, il est "naturel" que l'AKP soit en perte de vitesse après 16 ans au pouvoir, d'autant plus avec une situation économique dégradée, et un candidat, M. Ince, "plus charismatique que les gens ne s'y attendaient".
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