L'enjeu du vote, programmé mercredi après-midi à la chambre des Communes dans le cadre du projet de loi de sortie de l'Union européenne, est de deux ordres: d'un côté, le rôle accordé par le gouvernement au parlement dans le processus du Brexit. De l'autre, la bataille entre europhiles voulant maintenir des liens étroits avec l'Union européenne après la sortie du club fin mars 2019, et europhobes qui veulent rompre les amarres de manière nette.
Deux amendements se font face. Celui présenté par Mme May offre aux parlementaires un vote consultatif sur l'accord final, s'il y en a un, qui sera signé avec Bruxelles, sans possibilité de s'opposer au résultat des négociations. Un autre, adopté lundi soir par la chambre haute du parlement, propose au contraire de leur accorder un droit de veto et même le pouvoir de réclamer la reprise des négociations avec leurs propres directives.
"Nous ne pouvons pas accepter un amendement (...) qui permettrait au parlement de dicter l'approche du gouvernement sur la sortie de l'UE, liant les mains de la Première ministre et rendant plus difficile d'atteindre un bon accord pour le Royaume-Uni", a rétorqué le porte-parole de Mme May.
Ce méli-mélo montre une nouvelle fois la faible marge de manoeuvre de la dirigeante, à la tête d'une très mince majorité parlementaire et confrontée au désaccord profond qui continue de déchirer les Tories sur le Brexit, voté par 52% des Britanniques lors du référendum de juin 2016.
"Nous ne pouvons pas laisser les députés qui ont voté pour rester dans l'UE réduire au silence la volonté de la majorité. Il est de notre devoir de mettre en oeuvre le Brexit", a tweeté la députée conservatrice Andrea Jenkyns, se faisant l'écho des pro-Brexit accusant les europhiles de vouloir l'annuler ou le diluer.
"Besoin de réalisme"
Dans le camp d'en face, la députée conservatrice Anna Soubry s'étonne: "Un vote du parlement n'arrêtera pas le Brexit. Vous n'aviez pas voté pour reprendre le contrôle et rendre au parlement britannique sa souveraineté?" a-t-elle tweeté en référence à l'un des slogans de la campagne pro-Brexit.
L'auteur de l'amendement rebelle, Dominic Grieve, a appelé à mettre fin à "l'hystérie" et "aux accusations de trahison proférées contre ceux qui sont en désaccord avec l'approche du gouvernement", sur la chaîne Sky News.
La confusion qui règne à Londres inquiète de plus en plus à Bruxelles, rendant plus qu'incertaine la conclusion d'un accord en octobre, comme initialement prévu afin de permettre aux différents parlements nationaux et au parlement européen de s'exprimer avant la date fatidique du 29 mars.
Le sommet européen qui se réunira en fin de semaine prochaine devrait constater le peu de progrès effectués dans les négociations, Mme May ayant elle-même admis que le Brexit ne sera pas la préoccupation principale de ses partenaires, plus focalisés sur l'immigration.
La question irlandaise en particulier - le Brexit menaçant de recréer une frontière entre le nord rattaché au Royaume-Uni et le sud membre de l'UE - est loin d'être réglée. Tout comme celle de la coopération en matière de sécurité, Michel Barnier, négociateur en chef de l'UE pour le Brexit, ayant retoqué mardi les principales propositions de Londres.
Il a ainsi affirmé à Vienne que le Royaume-Uni ne pourrait plus continuer à participer aux réunions d'Europol, ni accéder aux bases de données de police communes ou continuer à bénéficier du système de mandat d'arrêt européen s'il continue de refuser la liberté de circulation des citoyens et le contrôle de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE).
"Nous avons besoin de plus de réalisme sur ce qui est possible et sur ce qui ne l'est pas", a-t-il martelé à l'adresse de Londres.
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