Au côté de l'ex-patron de France Telecom, devenu Orange, six autres dirigeants et cadres sont renvoyés devant le tribunal correctionnel de Paris, dont quatre pour "complicité" de harcèlement moral au travail, selon l'ordonnance des juges datée du 12 juin dont a eu connaissance l'AFP. Il s'agit de la première affaire de harcèlement moral institutionnalisé qu'aura à trancher le tribunal, neuf ans après les premières plaintes.
Frappée par une épidémie de suicides en 2008 et 2009, France Telecom a été la première entreprise du CAC 40 mise en examen pour harcèlement moral.
"Incitations répétées au départ", mobilités "forcées", missions "dévalorisantes", "isolement": dans leur ordonnance de plus de 650 pages, les juges ont retenu une longue liste de pratiques répétées qui constituent selon eux, "une politique d'entreprise visant à déstabiliser les salariés" et "à créer un climat professionnel anxiogène".
La procédure judiciaire avait retenu le cas de trente-neuf salariés: dix-neuf se sont suicidés, douze ont tenté de le faire, et huit ont subi un épisode de dépression ou un arrêt de travail. L'affaire avait éclatée en septembre 2009 avec la première plainte du syndicat Sud-PTT, suivie d'autres.
A l'époque engagé dans le délicat virage de la privatisation et des nouvelles technologies, le groupe voulait supprimer 22.000 postes entre 2006 et 2008 et procéder à 10.000 changements de métier, dans le cadre d'un plan de réorganisation baptisé NEXT.
Des propos de Didier Lombard à l'époque avaient marqué les esprits. "Ce sera un peu plus dirigiste que par le passé (...) En 2007, je ferai les départs d'une façon ou d'une autre, par la fenêtre ou par la porte", avait-il lâché en octobre 2006 devant l'association des cadres supérieurs et dirigeants de France Telecom (Acsed).
Dans un communiqué vendredi, le syndicat CFE-CGC, partie civile, "se félicite de cette décision" mais "regrette cependant que le chef d'homicide involontaire n'ait pas été retenu" par les juges.
"La responsabilité morale des sept prévenus dans la crise sociale et ses conséquences les plus tragiques, les suicides de nos collègues, est avérée", souligne le syndicat. "Il appartient désormais à la justice de se prononcer sur leur responsabilité pénale."
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