Jeudi, la journée de grève générale a encore alourdi le bilan de cette crise, quatre personnes au moins - dont un adolescent de 15 ans - ayant été tuées par balle dans des assauts donnés par les forces anti-émeutes et des milices paramilitaires progouvernementales contre les barricades érigées par les manifestants, selon le Centre nicaraguayen des droits de l'homme (Cenidh).
"Ortega continue sa politique criminelle contre le peuple du Nicaragua parce qu'il ne veut pas quitter le pouvoir, bien que le peuple lui dise de s'en aller", a dénoncé à l'AFP Azhalea Solis, une représentante de l'alliance de l'opposition.
Malgré les tensions, les deux camps sont appelés vendredi à s'asseoir à nouveau autour de la table de discussions pour une réunion de concertation.
Au cours de la réunion, prévue à 10H00 (16H00 GMT), les évêques catholiques, qui jouent le rôle de médiateur, feront connaître la réponse du président Ortega - un ex-guérillero de 72 ans, au pouvoir depuis 2007 après l'avoir déjà été de 1979 à 1990 - à leur proposition de réformes de la vie politique.
"Nous avons reçu la réponse du président de la République aux propositions que (...) nous lui avons présentées pendant la rencontre qui s'est déroulée" la semaine dernière", ont dit les évêques. Et "nous allons (la) faire connaître à la communauté nationale et internationale" vendredi.
"Résistance"
L'Eglise avance prudemment dans son rôle de médiatrice, refusant de jouer le jeu du président : le 30 mai, elle n'avait ainsi pas hésité à suspendre le dialogue après la répression exercée contre les manifestations organisées pour la fête des mères, qui avait fait 16 morts.
Héros de la révolution sandiniste de 1979, qui avait renversé la dictature des Somoza, Daniel Ortega est lui soumis à une pression croissante, la mobilisation contre lui s'amplifiant : jeudi, la grève générale décrétée par l'opposition a été largement observée, paralysant le pays avec des rues vidées de toute circulation, des commerces abaissant le rideau et des entreprises privées fermées.
"Cela a été une activité civique de résistance face à la répression du gouvernement", a souligné Azhalea Solis, qualifiant la grève de succès.
La grève "est une manière de faire pression sur ce gouvernement qui commet des atrocités", a confié une habitante de la capitale Managua, où la population a frappé contre des casseroles pour signifier son rejet du président. "Nous voulons un Nicaragua libre", a-t-elle ajouté.
La plupart des manifestations semble presque avoir oublié l'étincelle qui avait déclenché les premiers rassemblements de colère, le 18 avril : le gouvernement venait alors de dévoiler une réforme de la Sécurité sociale augmentant les cotisations pour tenter d'équilibrer le régime de retraites.
La réforme a vite été abandonnée mais le courroux populaire n'est pas retombé : les Nicaraguayens expriment désormais leur exaspération face à la confiscation du pouvoir par Daniel Ortega et son épouse Rosario Murillo, vice-présidente, et au manque de libertés dans ce pays pauvre d'Amérique centrale.
Regain de violences
Le Nicaragua connaît notamment un regain de violences depuis lundi après que les forces de sécurité ont tenté de démanteler de force les barricades dressées sur les routes.
Armés de frondes et de mortiers artisanaux face aux fusils des policiers anti-émeutes, les manifestants ont bloqué en plusieurs points les axes routiers, paralysant des milliers de camions et désorganisant l'approvisionnement.
Ces blocages ont miné la fragile économie nationale, avec un coût qui pourrait atteindre plus de 900 millions de dollars si le conflit se prolongeait, selon la Fondation nicaraguayenne pour le développement social et économique (Funides).
Après l'avoir longtemps soutenu, les milieux d'affaires ont coupé les ponts avec le président Ortega, lui reprochant la violente répression des manifestations.
Et la communauté internationale est elle aussi très critique : ces dernières semaines le Parlement européen, Amnesty international, l'ONU ou encore la Cour interaméricaine des droits de l'homme (CIDH) ont dénoncé le zèle des forces de l'ordre.
Le président Ortega "aggrave la crise en réprimant et en tuant", a dénoncé sur Twitter l'évêque auxiliaire de Managua, Silvio Baez, alors que "ce que crient les gens dans la rue c'est: qu'il s'en aille!".
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