Le chef du gouvernement israélien a planté le décor dès le premier jour de sa tournée européenne, lundi à Berlin, en mettant en garde Angela Merkel contre un nouvel afflux de réfugiés syriens si rien n'est fait pour contenir l'influence croissante de Téhéran au Moyen-Orient.
Après la chancelière allemande, le président français Emmanuel Macron va réitérer à son tour la nécessité de sauvegarder l'accord sur le nucléaire iranien qui, à défaut d'être parfait, offre aux yeux des Européens le seul garde-fou contre la prolifération nucléaire dans la région.
Selon ce texte signé en 2015 et dont les Etats-Unis sont sortis avec fracas le 8 mai, l'Iran renonce à toute ambition nucléaire militaire en échange d'une levée des sanctions internationales qui paralysent son économie.
Benjamin Netanyahu, qui a rallié l'Amérique de Donald Trump sur sa ligne, martèle pour sa part que l'accord n'empêchera pas l'Iran de se doter de la bombe atomique et l'aide à financer son expansion régionale (Syrie, Liban, Irak), au détriment de la sécurité d'Israël, en renflouant son économie.
Les deux dirigeants - qui se rencontrent pour la troisième fois à Paris depuis juillet 2017 - devraient constater une nouvelle fois leurs divergences sur les moyens de ramener la stabilité dans la région, tout en faisant la même analyse des menaces.
Approche frontale
Le "diagnostic est partagé sur le fait que la présence militaire de l'Iran ou de groupes pro-iraniens en Syrie représente une menace durable", relève la présidence française.
Mais Paris appelle à compléter l'accord existant en discutant avec l'Iran de ses activités balistiques et de son influence régionale, là où Israël est sur une approche beaucoup plus frontale pour forcer Téhéran à renégocier l'accord nucléaire.
"L'objectif de Benjamin Netanyahu c'est de sortir du tête-à-tête avec Washington" et de "contraindre a minima les Européens à renforcer l'accord existant", si besoin en réintroduisant des sanctions contre l'Iran, estime Laurent Khalfa, chercheur associé à l'Institut Prospective et Sécurité en Europe (IPSE) à Paris.
L'Etat hébreu mise pour cela sur deux leviers, la menace de sanctions américaines contre les entreprises européennes - qui ne sont pas encore entrées en vigueur - et l'axe entre les Etats-Unis, Israël et l'Arabie saoudite, dit-il.
Face à l'urgence iranienne, le conflit israélo-palestinien se trouve relégué à l'arrière-plan, même si le président palestinien Mahmoud Abbas est attendu prochainement à Paris et si Emmanuel Macron doit se rendre en Israël et dans les Territoires palestiniens d'ici la fin de l'année.
En décembre 2017, le président français avait exhorté Benjamin Netanyahu à faire des "gestes" envers les Palestiniens mais le processus de paix semble plus enlisé que jamais depuis la reconnaissance par Washington de Jérusalem comme capitale d'Israël.
"Start-up nation"
La situation s'est encore envenimée après la mort d'au moins 61 Palestiniens, tués par des tirs israéliens lors de manifestations le 14 mai le long de la barrière séparant la bande de Gaza d'Israël.
Emmanuel Macron a condamné "les violences des forces armées israéliennes" tout en rappelant "son attachement à la sécurité d'Israël", une position jugée trop simpliste dans l'Etat hébreu et trop complaisante à gauche de l'échiquier politique en France.
Les associations pro-palestiennes ont appelé à manifester contre Benjamin Netanyahu, qu'elles accusent de "crimes de guerre", dans toutes les grandes villes de France en fin d'après-midi.
Trois syndicats français de journalistes ont aussi jugé "insupportable" qu'il soit reçu par le président Macron.
Les deux dirigeants veulent de leur côté mettre à profit la Saison culturelle croisée France-Israël qu'ils lanceront mardi soir, à l'occasion des 70 ans de l'Etat d'Israël, pour montrer ce qui rassemble les deux pays.
"Macron a une approche extrêmement pragmatique, avec une volonté de découpler le sujet du conflit israélo-palestinien du volet de la coopération bilatérale", estime Laurent Khalfa en notant l'intérêt du président pour le modèle israélien de "start-up nation".
Le président et le Premier ministre inaugureront d'ailleurs une exposition retraçant les innovations technologiques israéliennes, israel@lights, au Grand Palais.
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