"J'ai eu sept réponses +en attente+ et un refus. Un choc. Je m'attendais à au moins un +oui+", se désole David, en terminale S dans cet établissement de Seine-Saint-Denis, pourtant assez bien coté. Il a demandé des licences dans son académie.
Comme lui, ils étaient des dizaines rassemblés jeudi devant les grilles du lycée pour protester contre la nouvelle plateforme d'admission dans l'enseignement supérieur, qu'ils jugent discriminant.
"Avant, en me levant, je regardais Instagram, maintenant je regarde Parcoursup. Je n'ai eu que des +en attente+", affirme Soyata. Pour cette lycéenne, qui a demandé des facs à Paris, les "Parisiens sont clairement favorisés".
Thomas, qui rêve de "quitter la banlieue", avait demandé des licences à la Sorbonne. Il n'a pour l'instant aucune réponse positive et se sent non seulement "découragé", mais aussi "discriminé": "on a l'étiquette du 93 sur le front".
Il y a quelques jours, le président du Conseil départemental de Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel, s'est interrogé dans une lettre à la ministre de l'Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, sur l'existence d'un biais géographique introduit dans le nouveau système, qui prendrait en compte la "localisation des lycées, et donc des quartiers", comme critère de choix.
Sud Education 93 relève aussi que, "parmi les critères de sélection, on trouve le lycée d'origine, les activités extra-scolaires ou encore le redoublement en classe de première ou de terminale." Une sélection qui s'ajoute aux nombreuses discriminations déjà subies, selon le syndicat, par les lycéens de Seine-Saint-Denis pendant leur scolarité.
Jeudi, Frédérique Vidal a balayé ces accusations, rappelant que des quotas de boursiers sont pour la première fois prévus cette année pour l'ensemble des formations et que des quotas géographiques doivent aussi permettre aux lycéens qui le souhaitent de "quitter leur académie de résidence".
"Que valent nos enfants ?"
Les universités franciliennes ont aussi élargi cette année leur bassin de recrutement à toute la région dans les formations les plus demandées comme la psycho, la première année commune aux études de santé (Paces) ou les métiers du sport (Staps). "Concrètement, un lycéen de Seine-Saint-Denis qui souhaite rejoindre" une de ces licences "est traité à égalité avec un lycéen issu des lycées de Paris ou de Versailles", fait valoir Mme Vidal.
Mais ces "compensations" ne suffisent pas à corriger un système foncièrement inégalitaire, estime Rodrigo Arenas, président de la FCPE (fédération de parents d'élèves) 93. Selon lui, Parcoursup ne fait que révéler le fait que "l'école effectue un tri social de la maternelle à l'université" et ne peut rattraper "25 ans de sous-investissement dans l'enseignement supérieur".
Ainsi, seuls les meilleurs de Seine-Saint-Denis pourront étudier à Paris, qui concentre tous les moyens, au détriment de la banlieue, affirme-t-il.
"Que valent nos enfants ?", s'interroge aussi Colette Denis, mère d'une élève de Terminale à Noisy-le-Grand.
Cette adhérente de la FCPE 93 a fait un sondage auprès des parents de deux lycées de cette ville située tout à l'est de la Seine-Saint-Denis. Leurs enfants ont reçu plus de réponses positives qu'attendu, mais rarement pour des formations dans l'académie de Paris, qui n'est pourtant qu'à 30 min de RER. "Par exemple, on est pris à Assas-Melun, mais pas à Assas. A Fontainebleau ou à Nanterre, à l'autre bout de l'Ile-de-France".
"Les élèves se sentent assignés à leur académie. Franchir le périphérique, c'est compliqué", soupire-t-elle. "On a l'impression de rester entre soi, Paris pour les Parisiens, les facs de Créteil pour la Seine-Saint-Denis. Ce n'est pas comme ça qu'on va favoriser la mixité".
Pour tous les élèves qui, comme Mmadi, en Terminale technologique, n'ont "même plus envie de passer le bac" tellement ils sont "démoralisés", les mairies communiste d'Aubervilliers et de La Courneuve ont ouvert une permanence pour les accompagner.
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