Un jour seulement avant la volte-face de M. Trump, des responsables américains laissaient entendre que ce sommet historique entre un président américain en exercice et un représentant de la dynastie régnante de Pyongyang avait toutes les chances de se tenir comme prévu le 12 juin à Singapour.
La rencontre aurait été le point d'orgue d'une relation passée en quelques mois des menaces apocalyptiques aux démonstrations de bonhomie amicale.
Après des décennies d'impasse dans imbroglio politique parmi les plus complexes du monde, il semblait y avoir eu de réels progrès, grâce, d'après les partisans de M. Trump, à son approche peu orthodoxe et sa disposition à parler à un paria international.
Pyongyang a libéré trois détenus américains, accepté de geler ses tirs de missiles balistiques et même détruit son seul site connu d'essais atomiques.
Mais à peine la poussière des explosions sur le site de Punggye-ri était-elle retombée, que M. Trump annonçait que le sommet était mort dans une lettre à M. Kim.
"Le timing de cette lettre (...) est éminemment discutable", commente Abraham M. Denmark, directeur du programme Asie au Centre Wilson.
"Elle survient quelques heures après la démolition du site nucléaire nord-coréen, garantissant ainsi que Washington porte le chapeau du coup porté à la diplomatie. La Corée du Nord fait figure de pays raisonnable".
Retenue nord-coréenne
Pour l'heure, Pyongyang a renforcé cette impression en faisant mentir ceux qui prédisaient en réaction un tir de missile ou du moins une volée rhétorique de bois vert.
Le Nord a parlé d'une décision "regrettable" et s'est dit prêt à "s'asseoir face à face, à tout moment".
Face à un tel sang froid, ajoute M. Denmark, les exigences américaines de maintien des pressions sur Pyongyang sonnent creux, en particulier pour un poids lourd régional.
"La Chine ne devrait pas manquer de soutenir plus ouvertement la Corée du Nord. L'application des sanctions sera moins stricte et je m'attends à la poursuite de contacts de haut niveau".
Il y a quelques mois encore, Pékin semblait quasiment vouloir se laver les mains de son turbulent voisin, ce qui semble bien moins vraisemblable aujourd'hui.
"Si les Etats-Unis reparlent (d'attaquer la Corée du Nord), il faut s'attendre à ce que Pékin exprime plus explicitement sa volonté d'intervenir".
La toute nouvelle retenue de Pyongyang s'est également attiré les applaudissements au Sud de la frontière fortement militarisée qui divise la péninsule.
Il est peu probable que le président sud-coréen Moon Jae-in, qui avait saisi l'occasion des jeux Olympiques d'hiver pour engager la détente avec son voisin, renonce à ce processus, même au prix d'une dégradation de l'alliance avec les Etats-Unis.
La volonté manifestée par le Nord de garder ouverte la porte du dialogue fournit à Séoul la couverture qu'il lui faut pour continuer sur cette voie, dit à l'AFP Go Myong-hyun, analyste à l'Institut Asan d'études politiques.
"Fragiliser l'alliance"
"Cela va être différent de l'année dernière quand la Corée du Sud et les Etats-Unis brandissaient la solidité de leur alliance et faisaient pression sur le Nord".
"M. Moon est obligé de doubler la mise. En clair, il va poursuivre sur la voie de l'ouverture et se concentrer sur le dialogue avec le Nord. L'alliance entre la Corée du Sud et les Etats-Unis va être fragilisée".
Mais, poursuit l'analyste, il n'y a pas que des mauvaises nouvelles pour le président américain.
Nombre d'experts avaient critiqué le rythme effréné des événements des derniers mois, estimant que l'homme d'affaires devenu président ne percevait peut-être pas tout de la complexité à traiter avec la Corée du Nord.
M. Trump, comme les faucons de son gouvernement, évoquaient la "dénucléarisation de la péninsule" comme une route à sens unique impliquant tout simplement que le Nord remise au placard son arsenal atomique.
Pyongyang définit ce concept de manière plus nuancée. Il est vraisemblable que pour le Nord, cela implique de garder une partie de ses armements nucléaires tout en demandant la réduction du nombre de soldats américains déployés en Corée du Sud et le relâchement de l'alliance entre Washington et Séoul.
Octroyer à Pyongyang un tête-à-tête sans pas concrets vers l'élimination de son arsenal nucléaire était chose risquée, relevaient les analystes.
Mais le fait que M. Trump soit disposé à claquer la porte de l'événement, stratégie prônée dans son livre autobiographique sur l'art de la négociation, pourrait uniformiser les règles du jeu.
"La Corée du Nord devra présenter des projets plus précis pour la dénucléarisation si elle veut discuter à l'avenir", dit M. Go.
A LIRE AUSSI.
La route d'éventuelles négociations avec Pyongyang semée d'embûches
Corée du Nord: l'accord sur les JO ne va pas désarmer Pyongyang
Donald Trump accepte une rencontre historique avec Kim Jong Un
Kim Jong Un et les émissaires du Sud discutent d'un possible sommet intercoréen
- application des sanctions
- arsenal nucléaire
- asan
- asie
- chine
- corée du nord
- corée du sud
- dynastie régnante
- Etats-Unis
- exigences américaines
- menaces apocalyptiques
- nucléaire nord-coréen
- Pékin
- pyongyang
- sang froid
- séoul
- Singapour
- sommet historique
- tir de missile
- tirs de missiles balistiques
- Washington
- Wilson
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.