Vingt ans après une première marche silencieuse, le 23 mai 1998, qui avait réuni 40.000 personnes à Paris pour honorer les victimes de l'esclavage colonial, les initiateurs de cette marche ont voulu réaffirmer qu'"un Français n'est pas uniquement +un descendant de Gaulois, blanc, chrétien et exclusivement européen+", selon les mots de Serge Romana, président du collectif pour la marche du 23 mai 2018.
Derrière une banderole sur laquelle on pouvait lire qu'"une autre France, c'est possible", ont notamment défilé l'ancienne ministre de la Justice Christiane Taubira, la journaliste Audrey Pulvar, le député de Guadeloupe Olivier Serva ou l'historien et président du Comité National pour la Mémoire et l'histoire de l'Esclavage (CNMHE) Frédéric Régent.
Le 23 mai a été déclaré l'année dernière "Journée nationale en mémoire des victimes de l'esclavage colonial". Cette journée nationale, réclamée de longue date par les ultramarins, a été instaurée par la Loi égalité réelle Outre-mer, parallèlement à la journée de commémoration de l'abolition de l'esclavage le 10 mai.
L'esclavage a été officiellement aboli en France le 27 avril 1848, il y a 170 ans.
"Nous célébrons les victimes de l'esclavage en ce 23 mai. Leur combat est toujours actuel: c'est celui qui s'oppose au mépris, au racisme, aux inégalités", a souligné la ministre des Outre-mer, Annick Girardin, lors d'un discours place de la République où est arrivé le cortège en fin d'après-midi.
La marche avait démarré place du Louvre, au coeur de Paris, avec des panneaux portés par des manifestants sur lesquels on pouvait lire la liste des noms des esclaves affranchis en 1848 en Martinique et Guadeloupe. "Regardez-les, ce sont vos aïeux", a exhorté l'acteur et directeur de théâtre Greg Germain, qui avait participé 20 ans plus tôt à la marche.
"Notre combat n'est pas terminé. Nous marchons pour affirmer que la France est notre pays, nous marchons pour nos fils et filles pour leur permettre de vivre dans une République sans racisme", a déclaré l'acteur, metteur en scène et directeur de théâtre français Greg Germain, qui avait participé 20 ans plus tôt à la marche.
"Préjugés et cupidité"
Ces noms seront prochainement intégrés au sein d'un mémorial national édifié au Jardin des Tuileries, a rappelé Mme Girardin.
"Nous allons fouler le pavé et le bitume, ensemble, pour dire ce qui fut et nous en souvenir. Mais ensemble aussi, nous allons combattre ce qui est, car aujourd'hui encore, ici et ailleurs, on capture, on vend, on torture, on viole, on tue. Par préjugé et par cupidité", a dénoncé Christiane Taubira, lors d'une série de prises de parole.
L'ex-ministre est à l'origine de la loi adoptée en 2001, deux ans après la marche, qui reconnaît la traite et l'esclavage comme un crime contre l'humanité.
Les chanteurs Philippe Lavil et Jacob Desvarieux, la chanteuse Viktor Lazlo, les journalistes Memona Hintermann, Harry Roselmack ou Claudy Siar, qui a regretté qu'il n'y ait "pas un visage noir ou asiatique sur le service public français", réclamant "une politique de quota", ont participé à cette marche.
Plusieurs actrices noires, comme Firmine Richard, Shirley Souagnon ou Mata Gabin, membres d'un collectif qui a dénoncé lors du festival de Cannes la sous-représentation des personnes noires dans le cinéma en France, ont aussi défilé.
Les anciens ministres des Outre-mer Victorin Lurel et George-Pau Langevin étaient également présents, comme des parlementaires de Guadeloupe, Martinique, La Réunion et la Guyane et des personnalités du monde associatif.
"Nous sommes les seuls, partout dans le monde, à devoir faire la preuve de notre appartenance au genre humain. Cela est inadmissible", a dénoncé le député de Guadeloupe Max Mathiasin.
Pour le sénateur guadeloupéen Victorin Lurel, "la France devient de plus en plus raciste, (...) il reste beaucoup de combats à engager", comme le "déboulonnage de la statue de Colbert devant l'Assemblée ou dans l'hémicycle du Sénat. Moi, petit-fils d'esclave, je parle sous l'ombre de l'esclavagiste instigateur du Code noir" qui légalisa le commerce négrier, a-t-il déploré.
Il y a encore "beaucoup de progrès à faire", a aussi reconnu l'ancien Premier ministre Jean-Marc Ayrault, futur président de la Fondation pour la mémoire de l'esclavage. "La lutte contre le racisme est toujours d'actualité".
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