Même arrivé en tête avec son alliance inédite entre les religieux chiites et les communistes (La marche pour la réforme), Moqtada Sadr est loin d'être assuré de gouverner l'Irak pour les quatre prochaines années.
"Mathématiquement, légalement et constitutionnellement, il est possible" de former une coalition qui gouvernera sans lui, affirme Fanar Haddad, spécialiste de l'Irak à l'Université de Singapour. Même si, concède-t-il, "c'est politiquement difficile".
C'est pourtant le plan sur lequel mise l'Iran qui a dépêché à Bagdad l'influent général Ghassem Souleimani, qui intervient régulièrement dans les affaires politiques et militaires irakiennes mais toujours dans le plus grand secret.
Depuis lundi, il rencontre les différentes forces politiques, ont indiqué à l'AFP plusieurs responsables. Devant eux, il a opposé son veto à toute alliance avec Moqtada Sadr, issu d'une lignée de dignitaires religieux, opposants respectés, qui provoque régulièrement l'Iran en prônant une défense sourcilleuse de l'indépendance politique de l'Irak.
La dernière bravade de l'ancien turbulent chef de milice devenu héraut des anti-corruption a été sa visite chez le grand rival régional de l'Iran, l'Arabie saoudite sunnite.
Gouvernement de consensus ?
Lundi soir, le général Souleimani a chargé les partis chiites conservateurs de rassembler des petites formations pour constituer un bloc parlementaire assez large pour obtenir le poste de Premier ministre, a indiqué un participant à ces rencontres à l'AFP.
Celui qui est chef d'une unité d'élite des Gardiens de la révolution iraniens a réuni le Premier ministre sortant Haider al-Abadi, son prédécesseur Nouri al-Maliki et Hadi al-Ameri, tête de liste de l'Alliance de la Conquête, des anciens du Hachd al-Chaabi, supplétif de l'armée contre le groupe Etat islamique (EI), proches de l'Iran.
Il a également interdit toute alliance avec le mouvement Hikma du chiite Ammar al-Hakim, le vice-président sunnite Oussama al-Noujaïfi et le Parti démocratique du Kurdistan (PDK, de Massoud Barzani).
Et le message semble avoir été entendu. Le porte-parole du bureau de M. Maliki, Hicham al-Roukabi, a indiqué à l'AFP que l'ancien Premier ministre était en discussion "avec des forces importantes, notamment l'Alliance de la Conquête, des partis sunnites, chiites et kurdes".
Moqtada Sadr, qui a tendu la main à de nombreuses forces, a, lui, déjà écarté une alliance avec les anciens du Hachd et M. Maliki.
Face à cette position, "l'Iran va exercer des pressions pour s'assurer que ces deux forces soient à la table des négociations", assure M. Haddad, et cela pourrait se traduire par "un nouveau gouvernement de consensus incluant toutes les parties et sans opposition formelle au Parlement".
"Mélange d'apothicaire"
Ce format l'a toujours emporté depuis les premières élections multipartites de 2005 dans un pays où, pour empêcher tout retour à la dictature après la chute de Saddam Hussein, le système politique complexe a été calibré pour parcelliser le Parlement.
Chaque scrutin parlementaire est ainsi suivi de longues tractations pour former une majorité gouvernementale et en 2010, la liste du laïc Iyad Allawi, honnie par Téhéran, arrivée en tête, avait été écartée par le jeu des alliances.
Moqtada Sadr a déjà rejeté dans un nouveau message sur Twitter un tel gouvernement de consensus qu'il a qualifié de "mélange d'apothicaire", prônant plutôt un "gouvernement de technocrates".
Le quotidien laïc al-Mada, indiquait mercredi, citant des "proches de Moqtada Sadr" que le l'influent leader chiite ne faisait pas de la nomination du Premier ministre une condition sine qua non mais qu'il entendait "être le faiseur de roi".
Car il sait que contrairement au sortant Abadi, nommé après un accord tacite entre les deux puissances agissantes en Irak, les Etats-Unis et l'Iran, les futurs contours du gouvernement sont plus difficiles à dessiner.
Washington et Téhéran sont à couteaux tirés du fait du retrait américain de l'accord sur le nucléaire iranien.
Et la personnalité et le parcours de Moqtada Sadr posent autant problème aux deux car s'il donne du fil à retordre à l'Iran, les Américains se rappellent de sa puissante milice, avec laquelle ils avaient croisé le fer dans la foulée de l'invasion de 2003.
Washington a toutefois dit respecter le résultat des élections en Irak.
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