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Violences sexuelles: des inquiétudes pour la protection des mineurs

Loin de fixer un âge de consentement sexuel à 15 ans, comme évoqué un temps, le projet de loi contre les violences sexistes et sexuelles, examiné à partir de lundi à l'Assemblée nationale, déçoit les associations, inquiètes pour la protection des jeunes victimes de viols.

Violences sexuelles: des inquiétudes pour la protection des mineurs
Le projet de loi contre les violences sexistes et sexuelles sera examiné à l'Assemblée nationale - GERARD JULIEN [AFP/Archives]

"C'est une marche arrière", déclare à l'AFP Martine Brousse, présidente de l'association La voix de l'enfant et membre du Comité d'experts qui avait été réuni pour étudier l'instauration d'un âge minimal de consentement à un acte sexuel.

La militante est amère. Pour elle, le projet de loi n'"apporte rien de plus" à ce qui figure déjà dans la loi et "risque d'être moins protecteur" pour les victimes.

Depuis sa présentation en mars en Conseil des ministres, l'article 2 cristallise les critiques. Très attendu par les associations de défense des droits des femmes et des enfants, choquées après deux retentissantes affaires où des fillettes de 11 ans avaient été considérées comme consentantes par la justice, il prévoit de "renforcer la répression des infractions sexuelles sur mineurs".

Les actes sexuels sur mineurs de 15 ans sont interdits par la loi. Les auteurs peuvent faire l'objet de poursuites pour viol (tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, commis par violence, contrainte, menace ou surprise), agression sexuelle ou pour le délit d'atteinte sexuelle.

Le gouvernement, y compris Emmanuel Macron le 25 novembre, avait affiché sa volonté de voir instauré un seuil en-deçà duquel un mineur n'aurait pu être présumé consentant à un acte sexuel et 15 ans avait été choisi.

Mais la première version du texte, mentionnant que "constituera un viol tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, commis sur un mineur de quinze ans par un majeur, lorsque celui-ci connaissait ou ne pouvait ignorer l'âge de la victime" a été retoquée par le Conseil d'État, qui craignait l'inconstitutionnalité de la formulation.

"Déqualification de viols"

L'actuel texte, qui écarte désormais toute automaticité, entend faciliter les condamnations pour viol en prévoyant que "lorsque les faits sont commis sur un mineur de quinze ans", les notions de contrainte et surprise peuvent "être caractérisées par l'abus de vulnérabilité de la victime ne disposant pas du discernement nécessaire pour consentir à ces actes".

Il aggrave en outre les peines pour l'atteinte sexuelle: sept ans contre cinq actuellement, et dix ans lorsqu'il y a pénétration.

"La philosophie est là" mais en "des termes qui respectent l'architecture de notre droit pénal et les principes constitutionnels", a défendu la secrétaire d'Etat à l'Egalité, Marlène Schiappa.

"Insuffisant" pour Muriel Salmona, psychiatre et présidente de Mémoire traumatique et victimologie, qui juge "dangereux" le "nouveau délit aggravé d'atteinte sexuelle avec pénétration", de nature à "faciliter les déqualifications des viols en délits".

"Plusieurs procès avaient requalifié des viols sur mineurs en atteinte sexuelle. C'est précisément cela que nous voulions empêcher", déplore dans un communiqué le Groupe F, fondé notamment par la féministe Caroline De Haas.

Pour Youssef Badr, porte-parole du ministère de la Justice, ces craintes proviennent essentiellement d'une "mauvaise compréhension du texte".

"Un viol et une atteinte sexuelle sont deux choses bien distinctes, il n'y a aucune volonté de correctionnaliser des crimes", défend-il. "Le fait d'augmenter la peine en cas d'atteinte sexuelle avec pénétration vise à sanctionner plus durement ces délits pour rappeler l'interdit de relation sexuelle" entre un mineur de moins de 15 ans et un majeur.

"On est quand même loin de ce qui était annoncé", juge Laurence Rossignol, ancienne ministre des Droits de femmes, de l'Enfance et de la Famille, reprochant au gouvernement un "manque de courage" pour défendre la mesure.

Pour la sénatrice socialiste, "on passe à côté de ce qu'on voulait, c'est-à-dire éviter les débats sur le consentement et le discernement d'un enfant".

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