"Que justice soit faite, c'est cela notre première préoccupation pour cette enfant qui était aimée de tous", a déclaré son père Mukole Musenga, lors d'une conférence de presse au cabinet des avocats de la famille à Strasbourg.
Accompagné de son épouse et d'une des soeurs de Naomi Musenga, il a estimé avoir été "baladé" sur les circonstances de la mort de sa fille, évoquant "un manque d'humanité total".
"J'ai très mal au ventre", "J'ai mal partout", "Je vais mourir...", souffle Naomi Musenga, peinant à s'exprimer, dans son appel du 29 décembre transféré par les pompiers au Samu.
"Si vous ne me dites pas ce qui se passe, je raccroche", réplique sur un ton péremptoire l'opératrice du Samu qui ajoute, moqueuse: "oui vous allez mourir, certainement un jour comme tout le monde", selon l'enregistrement obtenu fin mars par la famille.
Un enregistrement "qui foudroie" la famille, a souligné la mère de Naomi, Honorine Musenga.
"Justice pour Naomi Musenga"
Emmenée à l'hôpital plusieurs heures plus tard, après qu'un médecin de SOS Médecins ait appelé lui-même le Samu, Naomi Musenga, mère d'une petite fille d'un an et demi, est victime d'un infarctus puis transférée en réanimation avant de décéder dans l'après-midi. Son autopsie ne sera réalisée que le 3 janvier, 112 heures après sa mort.
Le rapport du médecin légiste évoque une "défaillance multi-viscérale sur choc hémorragique" mais aussi une "putréfaction avancée" du corps.
"Pourquoi on n'a pas répondu à son appel et pourquoi l'autopsie n'a pas été faite à temps ? Pourquoi on a laissé le corps de ma fille en putréfaction ?", s'est insurgé Mukole Musenga, assurant qu'elle n'avait pas d'antécédents médicaux.
"La responsabilité, c'est un ensemble. (...) C'est l'hôpital", a critiqué Honorine Musenga.
Un collectif baptisé "Justice pour Naomi Musenga" a appelé sur Facebook à une marche blanche en mémoire de la jeune femme le 16 mai à 17H30 à Strasbourg, un rassemblement "très important" pour le père de la jeune femme.
La révélation de l'enregistrement de cet appel téléphonique par le magazine alsacien Heb'di fin avril a entraîné, dans un premier temps, l'ouverture le 2 mai d'une enquête administrative par le directeur général des Hôpitaux universitaires de Strasbourg (HUS), Christophe Gautier, qui la souhaite "la plus complète et la plus rigoureuse possible".
La ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a également saisi l'Inspection générale des affaires sociales (Igas).
"Manquements"
Sur le plan judiciaire, le parquet de Strasbourg, auquel la soeur de Naomi Musenga avait écrit fin avril, a ouvert mercredi une enquête préliminaire pour "non-assistance à personne en péril", confiée à la direction régionale de la police judiciaire (DRPJ) Grand Est.
Une plainte pour "non-assistance à personne en danger" et "mise en danger de la vie d'autrui" sera déposée vendredi "contre X et contre les Hôpitaux universitaires de Strasbourg", a indiqué Me Mohamed Aachour, l'un des avocats de la famille.
L'opératrice du Samu concernée a été suspendue "à titre conservatoire" mercredi en attendant l'issue de l'enquête.
"Elle n'est pas bien, elle regrette", dit-on de source syndicale, soulignant qu'il s'agissait d'une "professionnelle confirmée".
"Elle a eu clairement des manquements, ce n'est pas excusable, mais on risque de ne s'en prendre qu'à elle pour que d'autres problèmes ne ressortent pas", insiste cette même source, pointant les "manques de moyens" des services d'urgence.
Des mesures de sécurité ont été prises mercredi pour le centre d'appels du Samu à Strasbourg, qui, depuis la diffusion de l'appel de Naomi Musenga, a reçu des appels "très agressifs", selon l'hôpital.
Dans des communiqués distincts, l'équipe de SOS Médecins de Strasbourg a affirmé être intervenue "dans l'heure suivant l'appel reçu du domicile de Naomi Musenga et être "à la disposition" des chargés de l'enquête, tout comme les pompiers du Bas-Rhin affirmant que, de leur côté, "la procédure en vigueur a bien été respectée".
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