"L'industrie du spectacle n'est pas différente des autres industries à travers le monde face à ces problèmes", a estimé mardi Cate Blanchett, espérant "un changement profond" des mentalités, à quelques heures de la première montée des marches pour le film "Everybody Knows" d'Asghar Farhadi, avec Penélope Cruz et Javier Bardem.
"Est-ce que j'aimerais voir plus de femmes en compétition ? Tout à fait. Est-ce que cela va arriver prochainement ? Je l'espère", a affirmé la star australienne, engagée dans la lutte contre le harcèlement sexuel à travers la Fondation Time's Up.
Vêtue d'un smoking rose pâle, elle a fait sensation lors de la conférence de presse du jury, aux côtés notamment de l'actrice française Léa Seydoux, la comédienne américaine Kristen Stewart, sa compatriote la réalisatrice Ava DuVernay, ainsi que les réalisateurs Robert Guédiguian et Denis Villeneuve.
Fait rare, le jury cannois est majoritairement féminin pour cette édition dont le producteur américain Harvey Weinstein, un grand habitué de la Croisette aujourd'hui accusé de harcèlement sexuel ou de viols par une centaine de femmes, sera l'un des grands absents. Même s'il sera évidemment dans tous les esprits.
Farhadi en compétition
Signe de cette nouvelle ère, le Festival distribue aux festivaliers un flyer rappelant les peines encourues pour harcèlement sexuel, avec un numéro de téléphone (+33 (0)4.92.99.80.09) pour toute victime ou témoin. Avec un mot d'ordre: "comportement correct exigé". Il organisera aussi samedi une montée des marches 100% féminine, "dédiée aux femmes du cinéma, une centaine", a indiqué Thierry Frémaux, le délégué général du Festival.
"Je ne peux que me réjouir de ce changement radical d'esprit, c'était nécessaire. Réjouissons nous qu'un événement marque cet espèce de changement qui aurait dû être là depuis longtemps", a commenté mardi la ministre française de la Culture, Françoise Nyssen, en déplacement à Cannes.
Depuis la matinée, devant un Palais des festivals devant lequel ont été installés plusieurs portiques de sécurité, des photographes avaient pris position pour ne pas rater la montée des marches du couple star, Penélope Cruz et Javier Bardem.
Il revient au réalisateur iranien Asghar Farhadi, plusieurs fois primé à Cannes et aux Oscars, d'ouvrir le Festival tourné vers l'Asie et le Moyen Orient et aux résonances politiques, cinquante ans après mai 68. "Everybody Knows" ("Todos lo saben"), projeté à l'issue de la cérémonie d'ouverture animée par le Français Edouard Baer, lancera la course à la Palme d'or.
Cinéastes sous surveillance
Ce film réunit les deux stars espagnoles dans un drame familial aux allures de thriller hitchcockien. Il faut remonter à 2004 et à "La Mauvaise Éducation" de Pedro Almodóvar, pour avoir un film d'ouverture qui ne soit ni en anglais ni en français.
Le film du réalisateur d'une "Séparation" sera le premier des 21 longs métrages en lice pour la Palme d'or. Parmi eux, figureront notamment le dernier opus de la légende Jean-Luc Godard, celui de l'Américain Spike Lee, de retour 27 ans après "Jungle Fever", ou encore ceux de l'Iranien Jafar Panahi et du Russe Kirill Serebrennikov, cinéastes sous surveillance dans leur pays. Interdits de voyager, tous deux n'ont pas pu venir sur la Croisette.
Avide de renouvellement, le Festival accueillera dix réalisateurs en lice pour la première fois pour la prestigieuse Palme d'or, dont la Libanaise Nadine Labaki - l'une des trois femmes en compétition - l'Egyptien A.B.Shawky, avec un premier film, ou les Français Eva Husson et Yann Gonzalez.
Il sera aussi question d'engagement avec la projection dans une section parallèle mercredi du premier film kényan jamais sélectionné, "Rafiki". Une histoire d'amour entre femmes, censurée au Kenya.
Autres temps forts attendus hors compétition: "Solo: A Star Wars Story", nouveau dérivé de la saga "Star Wars", et "The House that Jack Built" du Danois Lars Von Trier, Palme d'or 2000, qui marquera le grand retour du cinéaste, sept ans après avoir été déclaré "persona non grata" sur la Croisette pour des propos controversés sur Hitler.
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