"J'assume les conséquences de ce vote et je remettrai dans les prochains jours ma démission aux Conseils d'administration d'Air France et d'Air France-KLM", a déclaré M. Janaillac, le visage fermé face aux journalistes, regrettant un "immense gâchis qui ne peut que réjouir nos concurrents, fragiliser nos alliances et déboussoler nos équipes".
Selon un communiqué de la compagnie, qui connaissait vendredi sa 13e journée de grève depuis février, le PDG, âgé de 65 ans et aux commandes du groupe franco-néerlandais depuis juillet 2016, convoquera le conseil d'administration pour le 9 mai.
L'accord salarial proposé par la direction prévoyait de 2018 à 2021 "des augmentations générales de salaire de 7% sur quatre ans, s'ajoutant aux augmentations individuelles", contre 1% en 2018 en deux temps initialement.
Déjouant les pronostics, les 46.771 salariés d'Air France (sous contrat français) ont rejeté à 55,44% le projet d'accord avec un taux de participation de 80,33% à cette consultation sans valeur juridique.
Dix organisations de pilotes, d'hôtesses et de stewards et de membres du personnel au sol réclament 5,1% d'augmentation dès 2018 au titre d'un "rattrapage" nécessaire, après six ans de gel des grilles salariales.
"Ce vote est la traduction d'un malaise, il appelle une transformation profonde", a réagi M. Janaillac, espérant que son départ permette "une prise de conscience collective et d'amorcer les conditions d'un rebond".
Dans un communiqué, le gouvernement en a appelé "au sens des responsabilités de chacun". Prenant "acte du résultat", il a salué au passage "le courage de Jean-Marc Janaillac et le travail de redressement qu'il a mené depuis deux ans au sein du groupe".
Le départ de M. Janaillac plonge le groupe dans l'incertitude. Sa démission intervient le jour-même de l'annonce par le groupe d'une perte nette de 269 millions d'euros au premier trimestre, plombé par trois journées de grève (22 février, 23 et 30 mars) d'Air France sur cette période.
"Grosse satisfaction"
Au total, le coût des onze journées de grève étalées entre le 22 février et le 24 avril est estimé à "300 millions d'euros" par la direction qui prévoit d'ores et déjà un résultat d'exploitation en 2018 "en baisse sensible par rapport à 2017", quand il avait atteint 1,9 milliard d'euros.
Les salariés étaient également appelés à la grève jeudi et vendredi, avant de nouveaux préavis programmés pour lundi et mardi par l'intersyndicale à l'origine du conflit.
Sollicités par l'AFP, des représentants de l'intersyndicale se sont félicités du résultat de la consultation et de la participation.
C'est une "grosse satisfaction, même si nous ne validons pas le procédé", a commenté Christophe Campestre, le porte-parole du deuxième syndicat de pilotes à Air France, le Spaf. "Ca nous redonne de la légitimité, à l'inverse du but recherché par la direction".
Selon Jérôme Beaurain, du syndicat SUD-Aérien, "le système Gateau (du nom du Directeur des ressources humaines d'Air France Gilles Gateau, NDLR) s'écroule complètement", alors même que l'intersyndicale n'a "pas demandé la démission" de Jean-Marc Janaillac.
Du côté des non-grévistes, la CFDT affirme que le départ du PDG "augure d'une période trouble pour notre Compagnie et d'une grave crise de gouvernance dont Air France n'a pas les moyens, eu égard à l'environnement économique et concurrentiel dans lequel évolue Air France".
Les revendications de l'intersyndicale sont considérées par la direction comme une remise en cause des efforts déployés ces dernières années pour rattraper le retard de compétitivité de la compagnie, toujours confrontée à une très forte concurrence des compagnies du Golfe, mais aussi en Europe avec des compagnies low-cost agressives.
Avec une marge d'exploitation (un des critères de rentabilité du groupe aérien) de 555 millions d'euros, contre 910 millions pour KLM, la compagnie se situe "encore loin derrière beaucoup de ses compétiteurs", selon la direction.
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