Après un mois de grève par épisodes deux jours sur cinq, la SNCF a fait état jeudi d'un taux de grévistes de 18,15%, soit légèrement plus que le 24 avril mais nettement moins qu'au début du conflit.
Le nombre de grévistes chez les conducteurs, contrôleurs et aiguilleurs, indispensables à la circulation des trains, s'est inscrit en baisse, le trafic étant ces derniers jours de grève passé de "très perturbé" à seulement "perturbé" sur l'échelle de la direction. Contrairement au mouvement de 1995, le pays n'a pas été bloqué.
En attendant une "journée sans cheminot" --c'est-à-dire une journée de grève plus dure, qu'ils envisagent sans train-- le 14 mai, les syndicats de la SNCF ont manifesté jeudi pour "mettre la pression" sur Matignon.
Gardant un front commun malgré leurs dissensions, ils ne se rendent plus aux réunions animées par la ministre des Transports Elisabeth Borne, comme le 27 avril sur la qualité du service public ou jeudi sur l'avenir du fret ferroviaire.
Les syndicats ont en revanche accepté l'invitation du Premier ministre Edouard Philippe qui les recevra --avec Mme Borne-- un par un, lundi à Matignon.
Le numéro un de la CGT Philippe Martinez a indiqué qu'il attendait "des choses précises" sur la reprise de la dette de la SNCF par l'Etat.
L'exécutif s'est jusqu'à présent refusé à chiffrer la part de cette énorme dette que reprendra Bercy, mettant en avant la nécessité d'en savoir plus sur le futur modèle économique du groupe public --et du système ferroviaire en général-- et d'avoir une vision globale sur les investissements nécessaires dans le réseau.
M. Philippe devrait finalement en dire plus sur ce sujet. Il a promis de le faire avant que le Sénat ne s'empare du sujet le 23 mai.
Au Sénat le 23 mai
Pour le gouvernement, le cadre de la réforme du secteur ferroviaire est désormais établi, avec l'adoption à une large majorité du projet de loi par l'Assemblée nationale, le 17 avril. Les modalités de l'ouverture à la concurrence, la transformation de la SNCF en société anonyme à capitaux publics et la fin de l'embauche au statut de cheminot sont donc actées, selon lui.
Quelques points doivent être encore réglés, qui seront ajoutés dans le texte législatif lors de son passage au Sénat: la place des gares au sein de la nouvelle SNCF, celle de la sûreté ferroviaire (la Suge), une clarification du rôle de la holding qui coiffera le groupe public...
Avant cela, Mme Borne doit présenter un nouveau plan de relance du fret ferroviaire, à la mi-mai.
Et puisque le gouvernement a ouvert ce chantier, la direction de la SNCF a annoncé la prochaine filialisation de ses très déficitaires trains de marchandises, ce qui n'a pas manqué de courroucer un peu plus les syndicats.
C'est en fait surtout au niveau du groupe et de la branche du ferroviaire qu'il va falloir discuter dans les prochaines semaines. Il s'agit de définir le cadre qui remplacera le statut des cheminots et de boucler la convention collective --indispensable dans la perspective de l'ouverture du secteur à la concurrence-- à laquelle il manque notamment le très important chapitre sur les rémunérations, avec l'obligation d'arriver dans les deux cas à un résultat avant le 1er janvier 2020.
La SNCF a perdu à peu près 250 millions d'euros depuis le début du conflit. "C'est l'ordre de grandeur", a relevé jeudi son numéro deux Patrick Jeantet. Une somme à laquelle il faudra ajouter l'indemnisation des voyageurs réguliers: 10 millions pour les abonnés des TER sur le mois d'avril, par exemple.
Le groupe public s'emploie à adapter son plan de transport aux circonstances, tentant de faire circuler ses trains en fonction des besoins des voyageurs, des dates des week-ends et des festivals, et tâchant de prévenir ses clients en cas de pépin.
Pour les voyageurs au long cours, la SNCF s'est engagée à "garantir" les jours de grève les TGV et Intercités qui sont ouverts à la réservation. Jusqu'au 17 mai, pour l'instant.
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Attachés à leur statut, les cheminots prêts à en faire un casus belli
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