"Il n'est absolument pas possible que quelque chose qui m'est imputé dans ce jugement soit juste", a déclaré Karadzic au premier des deux jours du procès en appel à La Haye. "Mes déclarations ont été déformées, mes droits bafoués, des mobiles dissimulés", a ajouté le Serbe de 72 ans, en costume sombre et cravate rouge.
En mars 2016, le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) l'avait reconnu coupable et condamné à 40 ans de prison pour génocide, crimes de guerre et crimes contre l'humanité pendant le conflit de Bosnie.
Mis en cause dans le massacre de Srebrenica et le siège de Sarajevo, l'ex-président de l'entité des Serbes du pays, la Republika Srpska, a dénoncé des "mythes".
Après la mort pendant son procès de l'ancien président serbe Slobodan Milosevic, il est le plus haut responsable à rendre des comptes pour cette guerre qui a fait plus de 100.000 morts et 2,2 millions de déplacés entre 1992 et 1995.
Toujours considéré comme un "héros" par beaucoup des siens, Karadzic a fait appel sur 50 points de sa condamnation devant le Mécanisme pour les tribunaux pénaux internationaux (MTPI) de l'ONU, qui a pris le relais du TPIY.
Procès "inéquitable"
"Nous sommes ici aujourd'hui pour vous demander de casser la condamnation de Radovan Karadzic et d'ordonner un nouveau procès", a déclaré son avocat, Peter Robinson, jugeant le premier "inéquitable".
"Ce que nous vous demandons de faire dans le cas présent ne sera pas populaire à court terme mais cela servira la cause de la justice longtemps après nous", a-t-il lancé aux cinq juges du MPTI.
La défense a notamment bâti son appel sur le fait qu'en première instance Karadzic ait eu à choisir, sous la pression de l'accusation, entre se représenter lui-même - ce qu'il avait fait - ou témoigner en sa faveur, et non pas les deux.
Dans son verdict, le TPIY considérait que l'accusé, "fer de lance des structures militaires, politiques et gouvernementales" des Serbes de Bosnie, avait cherché à diviser le pays.
Il a été reconnu coupable de génocide pour le meurtre de près de 8.000 hommes et garçons musulmans à Srebrenica en juillet 1995, le pire massacre commis en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale.
Selon les juges, ce massacre s'inscrivait dans le cadre d'un "nettoyage ethnique" planifié par un trio regroupant Karadzic, son alter ego militaire, le général Ratko Mladic, et Slobodan Milosevic.
"Il n'y a jamais eu d'intention de séparer les populations", s'est cependant défendu l'accusé lundi.
"Un monstre"
C'est "un monstre", a lâché Munira Subasic, la présidente de l'association "Les mères de Srebrenica", qui a elle-même perdu son époux et son fils de 16 ans, et assistait à l'audience. "Karadzic est ni un être humain ni un animal parce qu'il n'a pas de sentiments", a-t-elle dit à l'AFP.
L'ex-psychiatre a aussi été condamné pour des persécutions, meurtres, viols, traitements inhumains ou transferts forcés, notamment lors du siège de Sarajevo, qui coûta la vie à 10.000 civils en 44 mois, ainsi que pour des camps de détention aux "conditions de vie inhumaines".
Il avait cependant été acquitté d'un des deux chefs d'accusation pour génocide, faute de preuves suffisantes pour affirmer, au-delà de tout doute raisonnable, qu'un tel crime avait été commis dans sept autres municipalités de Bosnie.
L'accusation, qui demandait la prison à vie, avait elle aussi fait appel du verdict, jugé trop clément.
Le procureur Serge Brammertz regrettait notamment que les juges aient retenu "une définition excessivement étroite de l'intention génocidaire".
Un temps le fugitif le plus recherché du continent européen, Radovan Karadzic a été arrêté en 2008 après près de 13 ans de cavale.
Ayant renoncé à sa mèche indomptable, il se cachait à Belgrade sous les traits d'un spécialiste de médecine alternative, arborant une barbe blanche nourrie.
Depuis 2009, il est derrière les barreaux du quartier pénitentiaire des Nations unies dans les dunes de La Haye, où il cohabite notamment avec Mladic, alias le "Boucher des Balkans", condamné à la perpétuité en novembre.
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