Après l'adoption par 454 voix contre 80, avec 29 abstentions, la ministre des Transports, Élisabeth Borne, a salué "une étape décisive", récusant tout "passage en force" sur cette réforme que l'exécutif a promis de mener "au bout" malgré les mouvements sociaux.
A la veille du vote, les syndicats avaient précisément dénoncé un passage "en force" avec cette première étape parlementaire. La CGT, première force syndicale à la SNCF, a appelé à un "très haut niveau" de grève mercredi et jeudi, nouvel épisode de mobilisation pendant les vacances scolaires.
Selon la direction de la SNCF, le trafic sera très perturbé mercredi avec un TGV sur trois prévu, ainsi que deux TER et Transiliens sur cinq.
A l'issue des quelque 24 heures de débats sur le texte, outre la majorité LREM-MoDem, une large majorité des LR (24 se sont abstenus) mais aussi les élus UDI-Agir ont voté pour, voyant dans la réforme "une chance pour la SNCF".
"Nous aurions eu de nombreux arguments pour ne pas voter ce texte, mais les députés LR ne sont jamais en posture politicienne et ils n'ont pour boussole que l'intérêt de la France", a affirmé Jean-Marie Sermier (LR). "Sur la méthode, le gouvernement a tout faux: les syndicats sont braqués, la grève est massive, la population est prise en otage", a-t-il notamment dénoncé.
Les députés du principal groupe d'opposition, favorable à l'ouverture à la concurrence, avaient un temps réservé leur vote entre abstention et pour. Ils ont joué les équilibristes sur ce texte, dénonçant plus la forme, notamment le recours aux ordonnances, que le fond. En phase avec l'offensive du parti, sur la ruralité notamment, ils ont aussi martelé leurs inquiétudes sur l'avenir des "petites lignes", récusées par la ministre.
Mais "quand une réforme, même largement insuffisante va dans le bon sens, on la vote dans l'intérêt du pays", a indiqué à l'AFP le vice-président du groupe Damien Abad, assurant que le président de LR, Laurent Wauquiez, avait "beaucoup poussé en ce sens".
"Sur ce sujet, comme sur la loi Travail où on est plutôt en phase, on ne va pas se boucher le nez", a renchéri un député LR.
"Agression de classe"
Les députés de gauche ont jusqu'au bout renouvelé leurs critiques, à l'unisson des syndicats, notamment contre une "agression de classe" avec la suppression du statut des cheminots pour les nouveaux embauchés (PCF) ou une "présomption de privatisation" avec le changement de statut de l'entreprise (PS).
Au long des débats la semaine dernière dans l'hémicycle, Insoumis et communistes avaient accusé le gouvernement de vouloir "scalper" les cheminots. Ils ont aussi récusé tout effet positif de l'ouverture à la concurrence, présentée par Élisabeth Borne comme un "aiguillon stimulant" pour la SNCF.
La gauche entend encore se "battre pied à pied" pour que la loi "soit retirée", a affirmé mardi l'un des porte-parole des députés communistes, Pierre Dharéville, notant que "la colère continue de s'exprimer fortement".
A l'appel de SUD-Rail, une centaine de cheminots, rejoints par des étudiants, s'est notamment rassemblée en début d'après-midi devant le ministère des Transports, où de nouvelles réunions bilatérales sont prévues.
Si le ministère "continue à discuter" avec les syndicats, de l'huile a encore alimenté lundi le feu de la contestation. La SNCF a annoncé son intention de filialiser sa branche de fret ferroviaire, Fret SNCF, lourdement endettée, une "nouvelle provocation" pour la CGT.
La confirmation par Emmanuel Macron dimanche d'une reprise progressive d'une partie de la dette de la SNCF par l'État à partir du 1er janvier 2020 n'a pas non plus convaincu les syndicats, qui notent qu'il n'y a "aucun engagement ferme", message convergent de la gauche. Cette dette a été l'Arlésienne des débats à l'Assemblée, objet d'incessantes questions de gauche et de droite.
Le texte ne sera pas examiné par le Sénat avant le 29 mai. Le ministère espère qu'il sera "définitivement voté au plus tard début juillet".
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