A l'issue de cette première journée d'audience au complexe pénitentiaire d'Aliaga, dans la province d'Izmir dans l'ouest de la Turquie, le tribunal a décidé le maintien en détention de l'accusé en invoquant un risque de fuite.
Durant l'audience, M. Brunson a fondu en larmes.
"Je n'ai rien fait contre la Turquie. Au contraire, j'aime la Turquie, je prie pour elle depuis 25 ans", a-t-il déclaré au tribunal en turc.
Installé en Turquie depuis 1993, l'homme de 50 ans dirigeait avec son épouse une église protestante à Izmir lorsqu'il a été arrêté par les autorités turques en octobre 2016. Il est maintenu en détention depuis.
Le pasteur est notamment accusé d'avoir agi pour le compte du réseau du prédicateur Fethullah Gülen, à qui Ankara impute le putsch manqué de juillet 2016, mais aussi pour le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Ces deux organisations sont considérées comme "terroristes" par la Turquie.
Installé aux Etats-Unis depuis une vingtaine d'années, M. Gülen nie toute implication dans le putsch manqué mené dans la nuit du 15 au 16 juillet 2016.
"Ce serait une insulte à ma religion. Je suis chrétien, je ne rejoindrais pas un mouvement islamique (le réseau de M. Gülen)", s'est défendu M. Brunson.
Il est également accusé d'espionnage à des fins politiques et militaires. "Je n'ai jamais été impliqué dans des activités d'espionnage", a-t-il répliqué.
"Son droit à la liberté et la sécurité est violé depuis longtemps. En premier lieu, nous espérons obtenir sa libération", a affirmé dimanche à l'AFP son avocat, Cem Halavurt. "Nous pensons qu'il sera finalement acquitté, puisque nous sommes persuadés de son innocence".
S'il est reconnu coupable, M. Brunson risque jusqu'à 35 ans d'emprisonnement.
Sa femme, Norine Brunson, était présente lundi, selon une journaliste de l'AFP, ainsi que le sénateur américain Thom Tillis et l'ambassadeur spécial des Etats-Unis pour la liberté religieuse internationale, Sam Brownback.
'Espoir'
Parmi les faits qui lui sont reprochés dans l'acte d'accusation, lu par la cour lundi, figurent des rencontres avec des gulénistes présumés, ainsi que des messes récitées pour les Kurdes et l'utilisation du terme "Kurdistan" pour désigner le sud-est de la Turquie.
Mais M. Brunson affirme qu'il n'y a "aucune preuve concrète" de liens entre lui et les gulénistes. Il a assuré défendre "l"intégrité territoriale de la Turquie" et ne pas être intéressé "par les origines ethniques des gens".
La détention de M. Brunson est l'un des principaux dossiers qui enveniment les relations entre les Etats-Unis et la Turquie.
"Cette relation va peiner à avancer tant qu'Andrew Brunson sera incarcéré", a souligné M. Brownback devant le tribunal.
L'ensemble de l'administration américaine, y compris le président Donald Trump, est mobilisée sur cette affaire, a-t-il ajouté. "Nous voulons qu'il soit libéré".
Washington espère "que le système judiciaire en Turquie résoudra ce cas promptement, de façon juste et transparente", a déclaré la porte-parole du département d'Etat, Heather Nauert, depuis la capitale américaine.
"Nous n'avons vu aucun indice crédible laissant entendre que M. Brunson est coupable d'un délit et nous sommes convaincus qu'il est innocent", a-t-elle martelé.
Les rapports entre les deux pays, alliés au sein de l'Otan, se sont nettement dégradés, notamment en raison du soutien apporté par Washington à une milice kurde syrienne considérée comme "terroriste" par Ankara, et de l'arrestation en Turquie de deux employés de missions américaines.
Par ailleurs, la Turquie a demandé à plusieurs reprises l'extradition de Fethullah Gülen, sans succès.
Prières
En septembre, le président Recep Tayyip Erdogan a suggéré que la Turquie pourrait libérer Andrew Brunson si les Etats-Unis lui remettaient M. Gülen.
Washington oeuvre pour la libération du pasteur mais a toujours rejeté l'idée d'un échange.
Le sénateur Tillis a exclu tout marché entre les deux pays pour obtenir sa libération. "Il n'y a pas d'accord. Ce que nous faisons, c'est que nous suivons le processus judiciaire ici", a-t-il dit à la presse devant le tribunal.
Les autorités américaines ont néanmoins discrètement abandonné les poursuites visant 11 agents de sécurité de M. Erdogan accusés d'avoir agressé des manifestants pro-kurdes à Washington lors d'une visite du président turc en mai 2017.
Deux partisans du président turc jugés dans la même affaire doivent par ailleurs être libérés prochainement, après avoir été condamnés à 366 jours de prison.
La prochaine audience a été fixée au 7 mai.
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