Culminant à 160 mètres, le nouveau tribunal s'impose depuis plusieurs mois dans le paysage de la capitale: c'est la deuxième tour la plus haute de Paris intra-muros, après la tour Montparnasse. Jusqu'à 9.000 personnes se rendront chaque jour dans ce bâtiment composé de quatre ensembles de verre superposés. Il a été conçu par l'architecte du Centre Pompidou, Renzo Piano, et son associé, Bernard Plattner.
A l'entrée des justiciables, l'article 9 de la déclaration des droits de l'Homme: "Tout homme est présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable". Le bâtiment lumineux joue sur les transparences, surtout dans la salle des pas perdus, derrière une grande façade vitrée. De grands escaliers mécaniques montent vers les salles d'audience.
Le tribunal de grande instance (TGI) et les vingt tribunaux d'instance d'arrondissement seront regroupés dans ce bâtiment qui compte 90 salles d'audience. La première audience civile aura lieu lundi mais, en correctionnelle, les procès démarreront mi-mai.
Les procès d'assises se tiendront eux toujours sur l'Ile de la Cité: la Cour d'appel, dont dépendent les cours d'assises, et la Cour de cassation resteront dans les murs historiques du Palais de justice, où Marie-Antoinette, Emile Zola ou Philippe Pétain ont été jugés.
"Je le trouve magnifique ce nouveau palais", s'est réjoui Jean-Michel Hayat, président du TGI de Paris. "Je suis convaincu qu'il répondra à une attente forte des justiciables", a-t-il dit à l'AFP.
"Il fallait absolument déménager. On ne pouvait plus rendre la justice dans des conditions satisfaisantes" dans l'ancien palais de justice, selon lui.
La principale difficulté tenait dans l'exiguïté des bureaux des magistrats et fonctionnaires du greffe. Les salles d'audience étaient utilisées au maximum de leur capacité, selon le ministère de la Justice. Les études ont "démontré que même au prix d'importants travaux, le palais avait atteint les limites possibles de son extension", indique le ministère.
Un financement controversé
Mais l'enthousiasme de M. Hayat n'est pas partagé par tous. De nombreux avocats regrettent déjà le palais de justice de l'Ile de la Cité. "Ses odeurs, ses couloirs, ses lumières… Tout va me manquer. C'est une page qui se tourne", a confié à l'AFP l'avocat Hervé Témime. "Nous circulions librement dans ce palais. Pas de badge pour accéder au greffe ou à l'instruction", a-t-il rappelé, alors que dans le nouveau tribunal, un badge sera nécessaire.
"Je suis attaché à l'Ile de la Cité comme le lierre l'est à l'arbre", a dit à Paris Match l'ancien garde des Sceaux Robert Badinter, mettant en avant "le long passé judiciaire" du tribunal.
Envisagé depuis longtemps, le déménagement a été relancé en 2003 par le président Jacques Chirac. En 2009, son successeur Nicolas Sarkozy a tranché en faveur des Batignolles, dans le cadre du projet du Grand Paris. Le quartier est toujours en chantier, alors que le prolongement de la ligne 14 du métro accuse deux ans de retard.
Le financement du tribunal, sous la forme d'un partenariat public-privé (PPP), est par ailleurs controversé.
L'association "La justice dans la cité", composée pour l'essentiel d'avocats, a mené une longue bataille judiciaire pour le maintien du TGI sur l'Ile de la Cité et réclamait l'annulation du contrat de PPP.
Le groupe Bouygues finance la construction du bâtiment et en assurera l'entretien et la maintenance pendant 27 ans. En contrepartie, l'Etat versera un loyer pendant la durée du contrat à l'issue duquel il deviendra propriétaire de l'édifice. Coût total: 2,35 milliards d'euros.
En décembre, la Cour des comptes a critiqué ce contrat: le recours à ce PPP, "guidé par des considérations budgétaires de court terme, implique des loyers annuels d'un montant moyen de 86 millions d'euros (jusqu'en 2044) qui pèseront fortement sur le budget du ministère de la Justice".
En mars, la ministre de la Justice Nicole Belloubet a d'ailleurs annoncé l'abandon des PPP pour les futures constructions de prisons et tribunaux.
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