D'après la prévision médiane de treize analystes, la croissance du produit intérieur brut (PIB) de la Chine s'est établie à 6,7% sur la période janvier-mars, trébuchant après avoir résisté à +6,8% au 4e trimestre 2017.
Le chiffre officiel sera publié mardi, de concert avec une salve de statistiques mensuelles.
Certes, la production industrielle et les ventes du détail --baromètre de la consommation-- avaient accéléré en janvier et février.
Mais en érigeant en priorité sa lutte contre la colossale dette chinoise, publique et privée, et les risques financiers qui y sont liés, le gouvernement a contribué à fragiliser la conjoncture: son durcissement a freiné drastiquement la progression du crédit et donc le financement de l'économie.
"Les efforts pour limiter l'endettement du secteur financier" et les durcissements réglementaires contre la "finance de l'ombre" (ensemble d'instruments de crédit peu régulés en-dehors des banques) "ont été plus concertés et plus importants qu'anticipé", observent les experts de Fitch Ratings.
Or, le ralentissement du crédit affaiblit le secteur immobilier, dont les ventes s'essoufflent déjà nettement, et la pression exercée sur la dette des collectivités locales et entreprises étatiques peut les conduire à sabrer leurs investissements dans les infrastructures. Or, immobilier et chantiers d'infrastructures sont deux piliers du PIB.
Le régime s'emploie cependant à rassurer: "La Chine va publier ses statistiques trimestrielles, qui seront encore meilleures qu'attendu, c'est un bon présage pour le reste de l'année", a ainsi lancé jeudi Yi Gang, gouverneur de la banque centrale.
Frictions commerciales
Par ailleurs, l'économie est hantée par le spectre d'une escalade de la crise commerciale entre Pékin et Washington, à l'heure où le président Donald Trump menace de taxer pour 150 milliards de dollars d'importations de produits chinois, tandis que le régime communiste détaille des représailles douanières en proportion.
"Ces tensions n'ont pas encore d'impact sur le PIB, les droits de douane annoncés n'étant pas encore appliqués (...) mais si les tensions continuent, elles pourraient saper la compétitivité des échanges chinois, et donc peser sur la croissance", avertit Ligang Liu, économiste chez Citibank.
Certes, le ton s'est fait plus conciliant ces derniers jours, avec un discours du président Xi Jinping promettant une "Chine toujours plus ouverte".
Mais le ministère chinois du Commerce a précisé jeudi qu'"aucune négociation" n'était lancée pour régler les différends commerciaux, tandis que Donald Trump, s'exprimant d'un ton martial le même jour, ne montrait nulle volonté de désarmer.
"De tels tarifs douaniers couvrant de multiples secteurs auraient de vastes répercussions" de part et d'autre du Pacifique, et pourraient en l'espace de deux ans réduire de 2 points de pourcentage par rapport aux prévision de base le PIB de la Chine et des Etats-Unis, estime Fitch Rating.
D'autres analystes se montrent beaucoup plus circonspects.
"Si on se base sur (l'annonce initiale de Donald Trump) de taxer de 25% pour 50 milliards de dollars de produits chinois, les pertes pour la Chine devraient rester minimales", juge Chen Xingdong, de BNP Paribas.
"Cela réduirait les exportations chinoises vers les Etats-Unis de 8,1 milliards de dollars, soit 1,8% des importations américaines venant de Chine... autrement dit 0,06% du PIB chinois de 2017", calcule-t-il. "Même dans le cas extrême où ces 50 milliards de dollars d'exportations chinoises cessaient complètement, cela entamerait de 0,4% le PIB" du géant asiatique.
Politique 'défavorable'
Sur le reste de l'année 2018, l'intensification de la campagne contre les risques financiers devrait continuer à contenir la croissance.
"La Chine s'est engagée à muscler ses efforts de désendettement sur 2018-2020, en se focalisant sur les abus financiers des gouvernements locaux et entreprises publiques", insiste Hao Zhou, de Commerzbank.
Dans ce contexte, "la politique économique dans son ensemble est devenue moins favorable à la croissance", sans compter que le refroidissement du secteur immobilier devrait continuer, souligne-t-il.
Les experts sondés par l'AFP tablent en moyenne sur une croissance annuelle en ligne avec l'objectif prudent d'"environ 6,5%" que s'est fixé Pékin pour 2018, très en-deçà du vigoureux sursaut (+6,9%) enregistré en 2017.
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