"Non, moi je m'en fous. C'est normal, le temps passe, je ne suis pas nostalgique", confie à l'AFP Claudia Cardinale, qui s'étonne même que son 80e anniversaire puisse susciter un quelconque intérêt.
"Je n'ai jamais caché mon âge, je n'ai jamais été et je ne serai jamais une diva", assure de sa légendaire voix rauque la star qui, en dépit une impressionnante filmographie, fait preuve d'une émouvante modestie.
Pour franchir ce cap symbolique, l'actrice sera sur les planches du Teatro Augusteo de Naples pour interpréter "La strana coppia", version féminine de "Drôle de couple" de Neil Simon.
La pièce - jouée à l'origine par deux acteurs - est mise en scène par Pasquale Squitieri, décédé l'an passé, qui a partagé sa vie pendant près de 30 ans.
"C'est un projet auquel Pasquale tenait beaucoup, je le fais en sa mémoire", explique celle qui, avec ses yeux de braise, a subjugué les plus grands cinéastes.
Elle n'avait que 16 ans lorsqu'elle a été happée par le grand écran, presque malgré elle puisqu'elle se rêvait plutôt institutrice ou exploratrice.
"Tous les journalistes, les producteurs, me photographiaient et me demandaient de faire du cinéma. Et moi je disais +non+, je suis avec maman, je ne veux pas", raconte-t-elle, les yeux rieurs soulignés d'un trait noir.
"Et un jour, je monte dans un avion et je vois ma photo partout sur les journaux et le titre: +La fille qui refuse de faire du cinéma+. Alors mon père m'a dit: +Mais fais-le, ce cinéma+", raconte-t-elle.
Née de parents siciliens à La Goulette, près de Tunis, le 15 avril 1938, Claude Joséphine Rose ne parle à ses débuts que français, arabe et sicilien. Elle devra être doublée, au moins jusqu'à "Huit et Demi" (1963), pour lequel Fellini lui demande de jouer en italien.
La belle brune devient "la fiancée de l'Italie" dès 1958, au côté de Marcello Mastroianni et de Vittorio Gassman dans "Le pigeon", de Mario Monicelli.
Enceinte après un viol, elle veut abandonner mais son mentor, le producteur-réalisateur Franco Cristaldi, la convainc d'aller accoucher secrètement à Londres et de confier l'enfant à sa famille. Elle présente Patrick comme son petit frère pendant sept ans avant de révéler la vérité.
'Indépendante et engagée'
Elle a 22 ans lorsque Luchino Visconti la fait tourner dans "Rocco et ses frères". "La" Cardinale crève ensuite l'écran dans "Le Guépard" au côté du flamboyant Alain Delon (1963), tout en tournant en parallèle "Huit et demi".
"Visconti, précis, méticuleux comme au théâtre, me parlait en français et me voulait brune aux cheveux longs. Fellini, bordélique et dépourvu de scénario, me parlait en italien et me voulait plutôt blonde aux cheveux courts", se souvient-elle.
Réclamée par Hollywood, où elle a toujours refusé de s'installer, elle séduit les Américains dans "La panthère rose" de Blake Edwards avec Peter Sellers et David Niven.
Ce dernier lui fait alors "le plus beau compliment" de sa carrière. "Il m'a dit: +Claudia, avec les spaghettis, tu es la meilleure invention des Italiens...+"
Les tournages s'enchaînent: "Le plus grand cirque du monde" de Henry Hathaway avec John Wayne, puis "Sandra" de Visconti, "Les Professionnels" de Richard Brooks.
En 1968, elle est l'héroïne du culte "Il était une fois dans l'Ouest", de Sergio Leone (1968), avec Charles Bronson et Henry Fonda.
Le Napolitain Pasquale Squitieri, son "seul amour" et le père de sa fille Claudia, lui fait aussi tourner une douzaine de longs métrages de 1974 à 2011.
Prix de la meilleure actrice en 1984 au Festival de Venise pour "Claretta" de Pasquale Squitieri, puis Lion d'Or en 1993 à Venise et Ours d'Or en 2002 à Berlin pour l'ensemble de sa carrière, elle a joué dans près de 150 longs métrages.
Farouchement opposée à la chirurgie esthétique, elle recommande aussi aux jeunes comédiennes de ne pas "tout accepter pour un rôle qui peut vous abîmer ou vous donner l'impression de vous vendre".
L'an dernier, le festival de Cannes a choisi une photo de sa jeunesse pour l'affiche de la 70e édition, rendant hommage à "une comédienne aventurière, femme indépendante, citoyenne engagée".
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