Depuis lundi, cet expert de 62 ans découvre une centaine de vins par jour du Médoc, Sauternes ou encore Pessac-Léognan et prend assidument des notes sur son ordinateur pour les lecteurs de son magazine Vinbladet. Dans des salles de dégustation des châteaux, il côtoie plus de 6.000 acheteurs accompagnés de négociants bordelais, journalistes...
Comme lui, ils sont venus des quatre coins du monde, surtout de Chine mais aussi de Grande-Bretagne ou des Etats-Unis, pour ces primeurs, un système unique au monde qui permet d'acheter près de deux ans avant sa livraison le dernier millésime des grands vins, en théorie à moindre prix.
"2017 est un vin équilibré, on a retrouvé le vrai Bordeaux, estime Peter Winding pour qui ce vin est fruité, aérien, plein de fraîcheur. Ce n'est pas un grand millésime, il est facile à boire et le plus important, il a une belle longueur".
"C'est un très bon millésime" pour les vins issus de vignes qui n'ont pas gelées il y a un an, selon le meilleur sommelier du monde 2013 Paolo Passo, qualifiant pour cette raison ce millésime d'"hétérogène". Car pour le reste de la production, le bon frôle le moins bon, disent plusieurs professionnels.
Goûter ce millésime s'avère encore plus important que pour les 2015 et 2016, années exceptionnelles qui présentaient une certaine homogénéité.
Mais l'exercice se révèle toujours délicat. "Le vin n'est pas prêt. Il faut avoir de l'expérience pour l'imaginer fini dans trois ou quatre ans", constate Peter Winding qui vient pour la 27e année aux primeurs, véritable examen de passage pour ces vins jeunes.
Car "les primeurs, c'est un pari", souligne Pauline Vauthier, co-propriétaire du château Ausone. "Les vins sont encore en élevage. La mise en bouteille aura lieu en juillet 2019 et ils seront livrés en février 2020. Mais tout sera payé en juin. Financièrement, c'est un gros avantage", explique cette viticultrice.
Prix à la baisse?
Cette année, elle ne présente que quatre vins sur sept en raison du gel qui a frappé Saint-Emilion, appellation la plus touchée du département avec 60 à 70% de perte. Certains châteaux ont été épargnés, d'autres ont tout perdu. Face au faible volume, des propriétés telles que château Angélus ont même décidé de vendre moins de vin en primeur.
Après deux beaux millésimes en 2015 et 2016, cette baisse de la production va entraîner une tension sur le marché. Surtout que certains vins sont en général difficiles à obtenir, même en primeur, comme dans la petite appellation Pomerol, s'inquiète un acheteur suisse.
La baisse de qualité du millésime comparé aux deux derniers, des taux de change parfois défavorables, des incertitudes sur certains marchés internationaux risquent d'entraîner une baisse des prix, disent les professionnels, en dépit de la baisse de l'offre et des coûts de production qui ont augmenté avec le gel.
"Les propriétés, suivant les éléments de qualité jugés par les journalistes et l'ambiance économique, vont fixer un prix qui sera relié par les négociants aux acheteurs", généralise Christian Moueix, président d'une société de négoce à Libourne.
Depuis le départ il y a quelques années du critique de vin Robert Parker, le pouvoir des journalistes et blogueurs est plus diffus, influençant dans une moindre mesure les prix fixés d'ici juin par les châteaux participant aux primeurs.
Sur les 6.000 vignerons du Bordelais, cette tradition des primeurs n'implique qu'une minorité, celle des grands vins aux gros chiffres d'affaires, mais notes et commentaires des spécialistes mondiaux rejaillissent sur tous les crus de la région.
"Les primeurs, ça ne concerne que 3% des Bordeaux, ceux qui vendent une bouteille au dessus de 50 euros. Mais tout le reste va bénéficier de l'image du millésime, lance Laurent, maître de chai dans une appellation qui ne présente pas de vins en primeurs. Ca a quand même la magie d'exister!"
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