A Nanterre, à l'ouest de Paris, la faculté d'où la contestation est partie en mars jouxte un bidonville où s'entassent des ouvriers maghrébins et portugais qui jamais n'ont approché les amphis du savoir. Au cours des mois de mai et juin, les deux mondes se frottent, se parlent, et les enfants courent dans les couloirs.
L'AFP est là et raconte.
Le dimanche à la Sorbonne
PARIS, 19 mai 1968 (AFP) - La Sorbonne est devenue depuis son occupation par les étudiants un lieu de visite pour les Parisiens.
Profitant du dimanche, les curieux sont venus en grand nombre voir comment ce qui fut le temple du savoir le plus abstrait est devenu le cadre d'une fête permanente et désordonnée. Dans la cour, où les groupes des diverses tendances ont installé des stands colorés et pavoisés aux couleurs d'Etats "révolutionnaires", les badauds, bouche bée, écoutent les orateurs débattre de la révolution sexuelle, de l'esthétique révolutionnaire ou de la libération des théâtres. Certains sont venus en famille, et les enfants, à peine surpris, courent dans les escaliers.
A tous les étages, sections, groupes, tendances, comités, se réunissent. Les comités d'action lycéens ont tenu, cette nuit et ce matin, une assemblée générale pour envisager les conditions de la poursuite de leur action. Dès demain matin - mais on ne sait encore comment - se réuniront des "états généraux de l'université" qui doivent siéger durant deux jours. Demain soir, Jean-Paul Sartre, Marguerite Duras, Jean Vilar et d'autres personnalités viendront participer à un débat.
Pendant ce temps, le "comité d'agitation culturelle" organise des spectacles. Hier soir, un ensemble de musiciens "psychédéliques" a eu quelque difficulté à se faire entendre d'un public aussi exigeant que surexcité.
A Nanterre par contre, où la crise a commencé, une paix inattendue règne sur le campus. "C'est devenu bien triste Nanterre", confiait, déçue, une jeune fille qui en revenait.
Le centre de gravité s'est déplacé. Aujourd'hui l'agitation de Nanterre est tombée et c'est à la Sorbonne que la fête continue.
AFP
Nanterre : fac ouverte
PARIS, 2 juin 1968 (AFP) - Les étudiants de Nanterre ont ouvert pour les fêtes de la Pentecôte les portes de la faculté aux ouvriers du voisinage et à leurs familles.
Plusieurs centaines de travailleurs sont venus aujourd'hui à la faculté accompagnés de leurs enfants. La plupart venait du bidonville tout proche et des bandes d'enfants basanés, portugais ou marocains, ont transformé les galeries et les couloirs de la faculté en terrain de jeu. Les plus jeunes avaient été confiés "à la garderie", pendant ce temps les parents ont pu participer à des discussions organisées dans des amphithéâtres et à plusieurs séances de cinéma gratuites.
A midi le restaurant universitaire a accueilli les visiteurs. Le prix du repas a été le même que pour les étudiants. (150 chômeurs prennent régulièrement leurs repas au restaurant universitaire depuis plusieurs jours).
A LIRE AUSSI.
Mai 68 vu par l'AFP - Devant l'usine : "votre programme, c'est pas exaltant"
Montpellier: démission du doyen de la Fac de droit après des violences contre des étudiants
Décès de l'ex-ministre Alain Devaquet, père d'une réforme avortée de l'université
Un film par jour, ou le secret de l'amour pour Erika et Ulrich
Mai-68: cinquante ans après, une histoire toujours difficile à commémorer
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.