Depuis l'attaque présumée aux "gaz toxiques" qui aurait fait des dizaines de morts samedi dans la ville de Douma, dernier bastion rebelle aux portes de la capitale syrienne, Washington et les capitales occidentales maintiennent la pression sur le pouvoir de Bachar al-Assad, qui dément toute responsabilité.
Lundi, l'ambassadeur syrien à l'ONU Bachar al-Jaafari a accusé les Etats-Unis, la France et d'autres pays occidentaux de professer de fausses accusations contre Damas "de façon à ouvrir la voie à une attaque en Syrie comme l'agression criminelle des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne en Irak en 2003".
Une riposte militaire pourrait cependant attendre un vote au Conseil de sécurité de l'ONU, probablement mardi, sur un projet de résolution américain créant un mécanisme d'enquête international sur l'usage des armes chimiques en Syrie.
Rejetant l'initiative américaine, Moscou, allié indéfectible du régime syrien, va déposer son propre projet de résolution.
Le secrétaire-général de l'ONU Antonio Guterres a quant à lui réclamé une enquête "impartiale" sur le drame.
"C'était atroce", "horrible", a lancé Donald Trump à la Maison Blanche, au sujet de l'attaque chimique présumée. "Nous y répondrons avec force", a-t-il averti lundi soir, promettant des décisions majeures "très bientôt".
"Etat d'alerte"
Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), l'armée syrienne a d'ailleurs placé ses forces "en état d'alerte" pour les trois jours à venir dans les aéroports et les bases militaires du pays déchiré depuis 2011 par une guerre dévastatrice.
Les troupes se préparaient à tout déploiement rapide, notamment à Damas, mais aussi dans la province de Homs (centre), ou encore celle de Deir Ezzor (est), selon le directeur de l'Observatoire, Rami Abdel Rahmane.
Cette mesure est généralement adoptée "en réaction à des menaces extérieures", a-t-il précisé.
Dans les rues de la capitale, des Syriens ne semblaient pas impressionnés par les menaces de l'étranger.
"Personne n'a peur d'une frappe", lance sur un ton de défi Amal, ingénieure de 27 ans. "On sait que tout ce qu'ils font, c'est pour miner (...) l'engagement de l'armée qui libère les régions" tenues par la rébellion, a-t-elle souligné.
"Honnêtement, je n'ai pas peur d'une frappe américaine. Après sept ans de ce qu'on a vu avec la guerre (...) il n'y a plus de peur", lâche de son côté Rahf, une étudiante.
En avril 2017, Donald Trump avait déjà fait bombarder une base militaire syrienne, en riposte à une attaque au gaz sarin imputée au régime, qui avait tué plus de 80 civils à Khan Cheikhoun (nord-ouest).
Ces dernières semaines, les Etats-Unis et la France avaient brandi à plusieurs reprises la menace de nouvelles frappes.
Selon les Casques Blancs, les secouristes en zones rebelles, et l'ONG médicale Syrian American Medical Society, plus de 40 personnes ont été tuées, tandis que plus de 500 blessés ont été soignés, souffrant notamment de "difficultés respiratoires".
Les forces du régime empêchant tout accès à Douma, les journalistes ne peuvent pas vérifier de manière indépendante ces accusations. L'AFP n'a en outre plus de correspondants dans la ville, toujours sous le contrôle des rebelles.
Pour la deuxième fois en deux jours, Donald Trump s'est entretenu au téléphone avec son homologue français Emmanuel Macron. Les deux présidents souhaitent "une réaction ferme de la communauté internationale", a rapporté l'Elysée.
Ligne rouge franchie ?
"Si la ligne rouge a été franchie, elle donnera lieu à une riposte", a renchéri mardi le porte-parole du gouvernement français, Benjamin Griveaux.
Face à l'initiative américaine concernant un mécanisme d'enquête international, la Russie a monté son propre projet de résolution, qui impliquerait l'Organisation internationale sur les armes chimiques (OIAC).
"Nous déposerons aujourd'hui un projet de résolution qui exigera une enquête", a déclaré le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov. Selon lui, les forces russes en Syrie et le régime syrien sont en mesure de garantir la sécurité des inspecteurs de l'OIAC.
Depuis le début de la crise, Moscou et le régime n'ont de cesse d'accuser Washington et les puissances occidentales de chercher un "prétexte" pour mener des frappes en Syrie. La Russie en outre a mis en garde lundi contre "de graves conséquences" en cas de frappes aériennes occidentales en Syrie.
Le conflit qui déchire la Syrie depuis 2011 a fait plus de 350.000 morts et s'est complexifié au fil des années avec l'implication de puissances étrangères sur un territoire morcelé.
L'attaque chimique présumée de samedi a eu lieu dans la ville de Douma, dernier fief rebelle aux portes de Damas que le régime est déterminé à reprendre coûte que coûte.
Les forces syriennes y ont lancé le 18 février une vaste offensive qui a tué plus de 1.600 personnes et qui a été suivie par l'évacuation de dizaines de milliers de combattants insurgés et leurs familles vers le nord-ouest du pays.
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