"Attention, moutons méchants", pouvait-on lire sur une large banderole installée sur un chalet de bois et de paille de ce lieu-dit, en bordure sud-est de la ZAD, à proximité de l'ex-route dite "des chicanes".
Dans le hangar à proximité qui servait d'abri aux moutons, plusieurs dizaines de zadistes se sont opposés aux forces de l'ordre, dont une dizaine étaient grimpés sur le toit. Certains ont jeté de la boue sur les gendarmes.
Des militants ont formé une chaîne humaine autour du bâtiment avant d'être repoussés dans un champ par les gendarmes, qui ont tiré des grenades lacrymogènes. "Les +100 noms+ resteront", ont crié les zadistes.
Au total, huit personnes, cinq hommes et trois femmes, qui vivaient sur place depuis 2013 et menaient des projets qu'ils n'avaient pas déclaré à la Mutualité sociale agricole (MSA), ont été expulsés.
"On leur a donné 10 minutes pour partir", a indiqué une zadiste à l'AFP.
Lors d'une conférence de presse lundi matin, la préfète de la région Pays de la Loire Nicole Klein avait assuré que les personnes qui avaient déposé des projets agricoles ou qui comptaient le faire ne seraient pas visées par les expulsions.
"Le projet agricole (des 100-noms") n'est pas complètement évident. Mais c'est surtout la proximité de la route (D281, NDLR)" qui justifie ce démantèlement", a expliqué Mme Klein par téléphone à l'AFP.
Un jardin vivrier et une bergerie ont été développés sur ce site avec ânes et moutons. Un paysan crêpier, qui mène son activité dans un autre hameau du bocage, vivait sur place en s'occupant de la bergerie.
Parmi les personnes venues soutenir les occupants, des retraités arboraient des panonceaux "Stop violence", "Patience et raison" ou encore "Place au dialogue".
Françoise, venue de Saint-Nazaire, est restée jusqu'au dernier moment sur le balcon du chalet. "Je tenais à défendre la maison et ses projets de vie, c'est une alternative à une vie conforme et stérile. Ce sont des projets enrichissants et attractifs", souligne-t-elle.
La sexagénaire, cheveux gris courts, qui a "de l'énergie à revendre et des causes à défendre", se dirige vers les autres maisons menacées d'expulsion. "Il faut éviter le massacre. Tout va être rasé sinon", interroge-t-elle.
"Créativité"
Un occupant qui se fait appeler "Camille", 34 ans, cheveux courts et fine barbe, vit aux "100 noms" depuis 2013. Ancien enseignant en BTS, il a participé à la construction du chalet, détruit par un incendie puis reconstruit en 2014.
"Une des choses qui m'a amenée à venir ici, c'est une inquiétude grave et profonde pour l'avenir, pour la situation de nos enfants, à cause du changement climatique", a-t-il déclaré à l'AFP.
"Camille" ne s'est pas inscrit à la sécurité sociale agricole. "Je cultive des poireaux que je ne vends pas. Je ne tire pas de revenus de mon activité agricole, ce n'est pas le but", a-t-il expliqué.
"Ici, on a un projet de territoire innovant. Il y a de la créativité, de nouvelles façons de s'organiser, une économie pas basée sur le système marchand mais sur l'échange et le partage", ajoute-t-il.
Guillaume, qui vit aussi sur place, oscille entre émotion et colère: "Ils disent défendre l'état de droit mais on n'a même pas vu l'ordonnance d'expulsion de l'huissier". "On s'est déclarés il y a cinq ans, on est identifiés, on a une boîte aux lettres, le facteur passe, on avait un troupeau qui grossissait, on avait juste besoin de temps pour développer l'infrastructure", déplore le jeune homme, qui compte "venir pour reconstruire".
aag-ahl-lv-hdu/jlv/bw
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