La décision doit être formalisée dans la soirée lors d'une réunion du conseil de surveillance de l'établissement francfortois.
Deutsche Bank a annoncé la tenue de cette réunion surprise "pour discuter de la présidence" et prendre "une décision à ce sujet".
Selon l'hebdomadaire Der Spiegel et le quotidien Handelsblatt, l'actuel PDG en poste depuis mi-2015 sera évincé et remplacé par un de ses adjoints en interne, l'Allemand Christian Sewing.
Âgé de 47 ans, ce dernier doit prendre les rênes lors de la prochaine assemblée générale en mai.
Sa désignation va marquer une inflexion dans la stratégie de la banque qui jusqu'ici a surtout misé sur la banque d'investissement et les marchés financiers.
Christian Sewing était en effet en charge pour l'instant de la banque de détail et aux particuliers. Il s'impose en interne dans la course à la succession face à l'autre "prince héritier", Marcus Schenk, responsable de la banque d'investissement.
L'homme a effectué pratiquement l'intégralité de sa carrière chez Deutsche Bank. Il y a commencé tout en bas de l'échelle par un apprentissage comme employé de banque et est de ce fait apprécié des salariés.
Sa promotion devrait entraîner le départ de Marcus Schenk, selon le Handelsblatt.
Pour le journal économique, l'arrivée de Sewing risque aussi d'être accueillie avec scepticisme par les marchés financiers.
Ces derniers attendaient plutôt la nomination d'un spécialiste de la banque d'investissement, secteur certes en crise mais qui avec 40.000 employés continue à générer la plus grand part du chiffre d'affaires.
L'actuel PDG britannique était dans la tourmente depuis plusieurs mois suite à trois exercices déficitaires d'affilée, y compris 2017 avec une perte nette de 735 millions d'euros et un chiffre d'affaires en baisse de plus de 12%.
John Cryan a réussi en partie à assainir la situation de la principale banque allemande en terme de revenus, en réglant de nombreux litiges judiciaires, notamment aux Etats-Unis. Mais en partie seulement.
Boulet
Il n'a pas pu résoudre le problème principal: après avoir été longtemps sa locomotive, la banque d'investissement est devenue le boulet de Deutsche Bank, qui ne s'est jamais vraiment remise de la crise financière de 2007-2008.
A partir du début des années 2000, sous l'impulsion du Suisse Josef Ackermann, l'établissement a donné la priorité à ce segment glamour, cherchant à jouer dans la même cour que les géants américains et méprisant la banque de détail.
La crise financière a mis fin à une phase de grande expansion. Aujourd'hui, la presse spécule régulièrement sur un possible plan de sauvetage du gouvernement allemand pour redresser cet ancien fleuron symbole de la puissance financière de la première économie européenne.
Un des grands actionnaires de Deutsche Bank, Union Investment, a tiré fin janvier la sonnette d'alarme.
"Si dans les deux ans environ les revenus ne se sont toujours pas redressés, nous pourrions assister à ce qui semble aujourd'hui inimaginable, le démantèlement de la banque et sa fusion avec d'autres grandes banques européennes, a déclaré son responsable, Ingo Speich.
L'ampleur des difficultés chez Deutsche Bank est apparue récemment au grand jour lorsque des critiques en interne d'une de ses dirigeantes, Kim Hammonds, ont filtré dans la presse. Elle a parlé de "l'entreprise la plus dysfonctionnelle" où elle ait travaillé.
Et l'établissement a essuyé de vives critiques du monde politique allemand en raison des bonis généreux qu'il continue à verser à ses cadres malgré ses pertes: 2,2 milliards l'an dernier contre 546 millions l'exercice précédent.
Deutsche Bank a vu son cours en Bourse perdre près de 30% de sa valeur depuis janvier.
Christian Sewing réussira-t-il à redresser la barre?: John Cryan "a dû affronter de graves problèmes mis sous le tapis par ses prédécesseurs" et "je doute qu'un nouveau PDG puisse réussir la transition avec succès car Deutsche Bank semble avoir un problème de fond", indique à l'AFP Markus Riesselmann, analyste de l'institut Independent Research.
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