Le tribunal compétent de l'Etat régional du Schleswig-Holstein, où l'ex-président catalan est incarcéré depuis une dizaine de jours, a décidé de poursuivre l'examen de la demande d'extradition de l'Espagne mais en rejetant le principal chef d'inculpation figurant dans le mandat d'arrêt européen récemment réactivé par Madrid.
Il a estimé que les faits de "rébellion" avancés par la justice espagnole pour l'organisation du référendum sur l'indépendance de la Catalogne à l'automne ne pouvaient être retenus au regard du droit allemand car ils supposeraient que Carles Puigdemont se soit directement rendu coupable de faits de violence.
Le tribunal "est d'avis qu'une extradition pour motif de rébellion est irrecevable", a-t-il indiqué dans un communiqué.
Seules les accusations de détournements de fonds publics, en lien avec l'organisation de cette consultation, peuvent à ses yeux constituer un motif de remise à l'Espagne, sous réserve d'un examen plus approfondi qui va avoir lieu dans les jours et semaines à venir. Mais elles sont trop faibles à ses yeux pour justifier un maintien en détention.
Caution
La juridiction a en conséquence ordonné la remise en liberté de Carles Puigdemont sous contrôle judiciaire, la conditionnant notamment au paiement d'une caution de 75.000 euros, dans l'attente de l'examen au fond de la demande d'extradition pour détournement de fonds.
Aucun détail n'a été immédiatement fourni sur le moment où l'indépendantiste catalan quittera sa prison de Neumünster dans le nord de l'Allemagne.
Cette décision prend le contrepied des réquisitions du Parquet général allemand, qui avait demandé mardi le maintien en détention de M. Puigdemont et reconnu la validité en droit allemand des deux chefs d'inculpation de la justice espagnole, à savoir "rébellion" et "détournement de fonds".
La notion de "rébellion" n'existe certes pas stricto sensu dans le droit national allemand mais elle se rapproche en revanche de celle de "haute trahison", inscrite elle dans le code pénal allemand, et une équivalence exacte n'est pas nécessaire pour procéder à une extradition, avait estimé en substance le Parquet général.
Surtout, le tribunal allemand inflige un revers aux autorités espagnoles. Si M. Puigdemont n'est remis à l'Espagne que pour détournement de fonds, c'est le principal pan de l'accusation de Madrid qui tombera. Il ne pourra en effet être jugé en Espagne pour rébellion.
Carles Puigdemont est poursuivi dans son pays à la fois pour "détournements de fonds" publics pour avoir organisé un référendum jugé illégitime par Madrid, dont le coût a été évalué par la justice espagnole à 1,6 million d'euros, mais surtout pour "rébellion" à la suite de la déclaration d'indépendance.
Déplacement en Finlande
Pour éviter une remise à l'Espagne sous ce chef d'inculpation, passible de 30 ans d'incarcération en Espagne, M. Puigdemont avait présenté lundi en Espagne un recours contre son inculpation pour "rébellion", soulignant l'absence de violence dans ses actes.
L'ancien président catalan, destitué par le gouvernement de Madrid après la vaine déclaration unilatérale d'indépendance de la Catalogne le 27 octobre, avait été interpellé fin mars dans le nord de l'Allemagne.
Il revenait d'un déplacement en Finlande, en voiture, et retournait en Belgique où il s'est installé pour échapper à la justice espagnole. Depuis, il est détenu à Neumünster.
En partant à l'étranger M. Puigdemont et six autres indépendantistes ont échappé aux poursuites en Espagne et cherché à "internationaliser" leur cause en impliquant d'autres pays européens.
Neuf indépendantistes sont actuellement en détention provisoire en Espagne, dont six membres de son exécutif et l'ancienne présidente du parlement catalan.
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