Jeudi matin, des familles aux visages graves et avides d'informations étaient agglutinées devant les portes du commissariat principal de la capitale de l'Etat de Carabobo, a constaté l'AFP.
Des barrières métalliques étaient disposées devant une des entrées, carbonisée, de cet édifice en briques et tout en longueur.
Jets de pierres, bousculades, cris, pleurs et évanouissements: mercredi soir, des heurts ont opposés des proches des détenus à la recherche de nouvelles et les forces de l'ordre à proximité du bâtiment.
Jusqu'ici, aucune liste avec le nom des victimes n'avait été fournie par les autorités.
Les Nations unies se sont dites jeudi "consternées" et ont demandé à Caracas à mener une enquête "efficace" pour déterminer la cause du drame.
"Les Etats sont garants de la vie et de l'intégrité physique des personnes privées de liberté", a souligné le bureau du Haut-Commissaire aux droits de l'homme.
La veille, après plusieurs heures d'incertitude, le procureur général Tarek William Saab avait confirmé tard dans la nuit de mercredi à jeudi le nombre de victimes.
"Face aux terribles évènements survenus dans le commissariat principal de l'Etat de Carabobo, où un incendie présumé a fait 68 morts, nous avons désigné quatre procureurs (...) pour éclaircir ce qui s'est passé", a déclaré Tarek William Saab, sur son compte Twitter.
M. Saab n'a pas précisé les circonstances de la tragédie, mais l'ONG "Une fenêtre vers la liberté", qui défend les droits des prisonniers, assure que l'incendie a été provoqué par un groupe de détenus qui cherchait à s'évader.
"Les détenus ont tenté de kidnapper deux policiers. Voyant qu'ils n'y arrivaient pas, ils ont déclenché une émeute et on décidé d'incendier des matelas en pensant qu'on leur ouvrirait alors les portes. Mais les grilles sont restées fermées", a déclaré jeudi à l'AFP le directeur de cette ONG, Carlos Nieto.
- Surpeuplement de 400% -
Les pompiers ont dû ouvrir un trou à l'arrière de l'édifice pour que les prisonniers puissent sortir. "Certains sont morts brûlés et d'autres par asphyxie", a ajouté M. Nieto, selon qui quelque 200 détenus se trouvaient dans le bâtiment.
La surpopulation dans les prisons de Venezuela oblige les forces de l'ordre à utiliser les commissariats comme lieux de détention de longue durée, alors que selon la loi, la détention ne peux excéder 48 heures dans ces locaux.
Pour le responsable de cette ONG, le gouvernement est le responsable de ce drame, alors que le surpeuplement représente 400% de la capacité d'accueil dans ce pays.
"S'il faut responsabiliser quelqu'un, c'est l'Etat pour négligence, car il utilise ces dépôts (de la police) comme des prisons alors qu'ils ne sont pas faits pour ça", a-t-il estimé.
Selon les premiers éléments de l'enquête, "66 hommes sont morts ainsi que deux femmes venues rendre visite" à des détenus, a précisé le procureur général.
M. Saab a assuré que le ministère public entendait "éclaircir de façon immédiate ces douloureux événements qui ont endeuillé des dizaines de familles vénézuéliennes, et établir les responsabilités" dans ce drame.
Le gouverneur de l'Etat de Carabobo a exprimé sa "consternation" sans toutefois faire de commentaires sur le nombre des victimes.
Au moins 388 personnes sont mortes depuis 2011 dans les prisons vénézuéliennes, selon les chiffres officiels et ceux des ONG de défense des droits de l'homme.
Le 16 mars, une soixantaine de détenus se sont brièvement échappés d'une prison de l'île touristique de Margarita (nord) par un trou qu'ils avaient ouvert dans un mur.
En août 2017, une mutinerie a fait 37 morts et 14 blessés dans un commissariat de l'Etat d'Amazonas (sud).
Ailleurs en Amérique latine, plusieurs mutineries, parfois suivies d'incendies, ont dépassé la centaine de morts chacune au cours des 30 dernières années.
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