La dépouille du lieutenant-colonel Arnaud Beltrame, gendarme "héroïque" tué après avoir pris la place d'une otage dans le Super-U de Trèbes est attendue en début d'après-midi à Paris, où une cérémonie lui sera dédiée mercredi aux Invalides en présence d'Emmanuel Macron. Le chef de l'Etat prononcera son éloge funèbre.
Un avion transportant son cercueil a décollé de Carcassonne peu avant midi et a atterri, selon les autorités, vers 14H00 à Villacoublay (Yvelines) où le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb remettra trois décorations à titre posthume à l'officier de gendarmerie, une des quatre victimes des attaques de vendredi.
Une minute de silence sera observée mercredi à 10H00 dans les gendarmeries, commissariats et préfectures de France, a annoncé Beauvau. Le même jour à 20H30, l'évêque aux armées, Mgr Antoine de Romanet, présidera une messe en hommage à Arnaud Beltrame en l'église Saint-Sulpice à Paris avant ses funérailles jeudi à 11H00 à la cathédrale de Carcassonne.
Avant cette journée de recueillement, la polémique sur le suivi de Radouane Lakdim et des islamistes radicaux, lancée par des dirigeants de droite et d'extrême droite, ne faiblissait pas.
"Il n'y a pas pire instrumentalisation que de se cacher derrière un héros pour échapper à sa propre incompétence et à sa propre lâcheté. (...) Il n'y a pas pire mépris à l'égard des victimes que de ne rien vouloir changer", a de nouveau accusé la présidente du FN, Marine Le Pen, qui avait déjà pointé une "défaillance profonde" des autorités.
Le président des Républicains, Laurent Wauquiez, avait dénoncé lundi une "coupable naïveté" d'Emmanuel Macron, réclamant le rétablissement de l'état d'urgence et l'expulsion des étrangers fichés "S".
Le Premier ministre Edouard Philippe leur a répondu mardi en disant se "méfie(r) des réponses juridiques rapides". Il existe déjà "un arsenal juridique (...) pour comprendre, suivre, sanctionner", a-t-il souligné.
"Radicalisation latente"
Tué vendredi lors de l'assaut du GIGN, Lakdim, petit délinquant radicalisé de Carcassonne, était fiché "S" (pour "sûreté de l'Etat") depuis 2014 et inscrit depuis novembre 2015 au Fichier des signalements pour la prévention et la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT).
La Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) lui avait envoyé en mars une convocation pour mener un "entretien d'évaluation" et décider d'une éventuelle clôture de l'enquête administrative menée à son encontre depuis mai 2013, a indiqué une source policière, confirmant une information de RTL.
Le "suivi effectif" de Radouane Lakdim était "toujours en cours (en mars) mais n'avait pas permis de mettre en évidence des signes précurseurs d'un passage à l'acte", a assuré lundi le procureur de Paris François Molins.
Un "suivi" ne signifie pas nécessairement une surveillance physique ou technique (écoutes, vérifications des factures de téléphonie...). D'autant que nombre de mesures de surveillance technique sont mises en échec par les messageries cryptées qui passent par internet.
La dangerosité de Radouane Lakdim a-t-elle été sous-évaluée? Son passage à l'acte illustre en tout cas le casse-tête et les limites auxquels sont confrontés les services de renseignement, chargés de suivre 19.745 islamistes radicaux fichés dans un contexte où la menace terroriste vient davantage de l'intérieur.
Lakdim avait été "détecté" par la DGSI en mai 2013 en raison de contacts avec un individu condamné pour "association de malfaiteurs en vue de la préparation d'actes de terrorisme commis en 2008", a précisé à l'AFP une source policière.
Plusieurs informations parvenues en mai 2014 ont aussi fait état d'une "radicalisation latente" et de velléités de départ en Irak ou Syrie. Une fiche "S" est alors émise, mais les investigations ne révèlent aucun signe de radicalisation violente.
En septembre 2017, son compte Facebook, attestant un intérêt pour l'idéologie jihadiste, attire de nouveau l'attention de la DGSI mais les investigations ne donnent aucun résultat probant.
Selon une source proche du dossier, Radouane Lakdim avait par ailleurs été "énervé" par une autre convocation devant le tribunal correctionnel de Carcassonne le 23 avril, où il devait être jugé pour port d'arme blanche et pour avoir conduit malgré l'annulation de son permis.
Mardi, les enquêteurs cherchaient toujours à déterminer s'il a pu bénéficier de complicité de deux de ses proches, dont sa compagne de 18 ans fichée comme lui pour radicalisation, toujours entendus en garde à vue.
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