Les deux suspects ont été mis en examen pour "homicide volontaire à raison de l'appartenance vraie ou supposée de la victime à une religion", a-t-on appris mardi de source judiciaire.
Dès lundi, le parquet de Paris avait retenu le caractère antisémite dans cette affaire. "Les déclarations d'un des suspects en garde à vue et le fait qu'ils connaissaient tous les deux la religion de la victime ont motivé cette décision", d'après des sources proches de l'enquête.
Placés en détention provisoire, ils sont également poursuivis pour "vol aggravé" et "dégradation du bien d'autrui par un moyen dangereux".
Le corps de Mireille Knoll a été retrouvé en partie carbonisé vendredi soir dans son modeste appartement du XIe arrondissement, où elle vivait seule.
Les enquêteurs se sont rapidement orientés vers la piste criminelle, après la découverte de plusieurs départs de feu à son domicile, puis de traces de coups de couteau sur le corps de la victime.
Née à Paris en décembre 1932, Mireille Knoll avait échappé dix ans plus tard de justesse à la rafle des Juifs du Vél d'Hiv' de juillet 1942 en s'enfuyant de Paris avec sa mère.
"Marche blanche" mercredi
"J'exprime mon émotion devant le crime épouvantable commis contre Mme Knoll. Je réaffirme ma détermination absolue à lutter contre l'antisémitisme", a réagi sur Twitter le président Emmanuel Macron.
Le premier suspect, né en 1989 et connu des services de police pour des affaires de viol et d'agression sexuelle, est un voisin qui avait l'habitude de rendre visite à la victime. Il était passé dans son appartement dans la journée.
"Apparemment, ma mère le connaissait très bien et le considérait comme un fils", a déclaré à l'AFP le fils de la victime.
Le second mis en examen, âgé de 21 ans et connu pour des vols avec violences, se trouvait également dans l'immeuble le jour du meurtre.
"C'était une femme extrêmement modeste. Il n'y avait absolument rien de valeur à voler", a déclaré à l'AFP Gilles-William Goldnadel, avocat de sa famille.
"Je ne veux pas conjecturer, je prends acte de l'incrimination pour antisémitisme et me félicite de la réactivité de la justice", a-t-il ajouté.
En avril 2017, Sarah Halimi, une femme juive de 65 ans, avait été tuée à Paris par son voisin. Aux cris d'"Allah Akbar", entrecoupés d'insultes et de versets du Coran, le jeune homme l'avait rouée de coups, avant de la précipiter dans le vide. La juge d'instruction en charge de cette enquête avait mis près d'un an, au terme d'un bras de fer judiciaire, à en retenir le caractère antisémite.
Le nombre d'actes antisémites a certes de nouveau reculé en 2017, mais reste à un niveau préoccupant, et la communauté juive de France, qui représente moins de 1% de la population, est la cible d'un tiers des actes haineux recensés dans le pays. En outre les violences sont pointées en hausse, et cette augmentation des "passages à l'acte" préoccupe les autorités.
Depuis 2006 et l'assassinat d'Ilan Halimi, onze personnes ont été tuées en France parce que juives, selon les responsables communautaires. "Cette succession de meurtres nous rappelle que la communauté juive est la cible privilégiée de ceux qui haïssent la République et ses valeurs", a dit à l'AFP le président du Consistoire israélite, Joël Mergui.
"Crime odieux" pour le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux, "acte de barbarie" pour le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb, "assassinat ignoble" selon le président des Républicains Laurent Wauquiez: les réactions dans la classe politique ont été nombreuses après ce nouveau meurtre.
Christophe Castaner, délégué général de La République en marche, a dénoncé un antisémitisme d'une nouvelle forme "parce qu'il est banalisé". Il a appelé les adhérents de son mouvement à participer à la "marche blanche" organisée par toutes les grandes organisations juives mercredi après-midi à Paris en mémoire de Mireille Knoll.
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