Trois jours après la mort de Mireille Knoll, 85 ans, dont le corps lardé de coups de couteau et en partie brûlé a été retrouvé dans son appartement incendié à Paris, le parquet de Paris a ouvert une information judiciaire pour "assassinat à raison de l'appartenance vraie ou supposée de la victime à une religion et sur personne vulnérable", a indiqué une source judiciaire.
Un suspect est en garde à vue depuis samedi et un deuxième y a été placé dans la nuit de dimanche. Les deux hommes doivent être présentés à un juge d'instruction en vue de leur éventuelle mise en examen, selon cette source. Le parquet a requis leur placement en détention provisoire.
Né en 1932 à Paris, Mireille Knoll avait échappé dix ans plus tard de justesse à la rafle des Juifs du Vel d'Hiv' de juillet 1942 en s'enfuyant de Paris avec sa mère.
"Toute la lumière doit être faite sur ce crime odieux", a twitté le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux. En visite à Jérusalem, le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a fait part de son "émotion". Le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb a également fait part dans un communiqué de "sa profonde tristesse et de son indignation", en dénonçant un "acte de barbarie". "S'attaquer à un juif, c'est s'attaquer à la France et aux valeurs qui constituent le fondement même de la Nation", a-t-il ajouté.
Le président des Républicains, Laurent Wauquiez, a dénoncé un "assassinat ignoble", espérant que "chacun ouvre enfin les yeux sur le nouvel antisémitisme qui se développe dans notre pays".
Ce meurtre a suscité des réactions émues au sein de la communauté juive française, déjà mobilisée ces derniers mois après le meurtre de Sarah Halimi, une juive orthodoxe de 65 ans tuée à Paris par son voisin en avril 2017. La juge d'instruction en charge de cette enquête avait mis près d'un an à en retenir le caractère antisémite.
Marche blanche
Le corps de Mireille Knoll avait été retrouvé en partie carbonisé vendredi peu avant 19H00 dans son appartement du XIe arrondissement où elle vivait seule. Les policiers se sont rapidement orientés vers la piste criminelle, après la découverte de plusieurs départs de feu dans l'appartement, puis de traces de coups de couteau sur son corps.
Mme Knoll habitait au deuxième étage d'un immeuble qui en compte dix et qualifié par les voisins d'"habituellement très calme" et dépourvu de tensions notables, selon un journaliste de l'AFP.
A la police, un membre de la famille de Mireille Knoll a dit soupçonner un voisin qui avait l'habitude de venir la voir et était passé dans l'appartement dans la journée. C'est cet homme, né en 1989, qui a été placé samedi en garde à vue.
"Apparemment ma mère le connaissait très bien", a déclaré à l'AFP le fils de la victime. Selon une source policière, il était connu des services de police pour des affaires de viol et d'agression sexuelle. Selon cette source, le second suspect, âgé de 21 ans et connu pour des faits de vols avec violences, se trouvait dans l'immeuble de Mme Knoll le jour du meurtre. Il a été interpellé après avoir été désigné par le premier suspect, a indiqué une source proche de l'enquête.
Le mobile reste pour l'heure inconnu. "Nous sommes vraiment tous sous le choc. Je ne comprends pas comment on peut tuer une femme qui n'a pas d'argent, et vit dans un HLM", a ajouté le fils de la victime.
Le président du Consistoire israélite, Joël Mergui, a salué auprès de l'AFP la "réactivité" des enquêteurs et du parquet après que le mobile antisémite a été retenu.
Le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), Francis Kalifat, a exprimé sur Twitter son "soulagement" que ce motif antisémite ait été retenu, mais aussi sa "colère" et son "inquiétude face à une telle barbarie". Le Crif et plusieurs autres organisations ont appelé à participer à une "marche blanche" en hommage à la victime mercredi après-midi à Paris.
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