Alors qu'en tout, au moins 113 diplomates russes ont été expulsés au même moment notamment par les Etats-Unis et 16 pays de l'Union européenne, Moscou a immédiatement dénoncé un "geste provocateur" et promis de riposter à son tour, au risque de relancer la guerre des sanctions.
"La Russie n'a jamais eu et n'a rien à voir avec cette affaire", a réaffirmé le Kremlin.
Avec l'expulsion de 60 "espions" russes (48 dans diverses missions aux Etats-Unis et 12 à la mission russe auprès de l'ONU), Washington mène, et de loin, le mouvement, dans sa manifestation de "solidarité" la plus marquée avec Londres depuis l'empoisonnement à l'agent innervant de Sergueï Skripal et de sa fille Ioulia, et ce malgré les réticences persistantes de Donald Trump à critiquer frontalement son homologue russe Vladimir Poutine.
Déplorant un "grave coup à la fois quantitatif et qualitatif" à la présence russe aux Etats-Unis, l'ambassadeur de Russie Anatoli Antonov a estimé sur le site d'information public Sputnik que Washington avait "réduit à néant le peu qu'il restait encore des relations russo-américaines".
"Les Etats-Unis sont prêts à coopérer pour bâtir une meilleure relation avec la Russie, mais cela ne peut que se produire si le gouvernement russe change d'attitude", a commenté la porte-parole de la Maison Blanche.
Le président du Conseil européen Donald Tusk a lui prévenu que "de nouvelles expulsions" n'étaient "pas exclues" après cette opération "concertée". "Pour la première fois depuis la deuxième guerre mondiale, une arme chimique a été employée en Europe", a souligné le chef de la diplomatie allemande Heiko Maas.
La France, l'Allemagne et la Pologne ont demandé chacune à quatre diplomates russes de partir, suivies notamment par les pays baltes, la Hongrie ou encore l'Espagne. L'Ukraine, en guerre avec des séparatistes prorusses depuis 2014, en a chassé 13, et plusieurs membres de l'Otan, comme le Canada, la Norvège et l'Albanie, en ont déclaré d'autres persona non grata.
"Réponse extraordinaire"
Le Royaume-Uni, qui avait déjà expulsé 23 diplomates russes et annoncé le gel des relations bilatérales, a salué la "réponse extraordinaire" de ses alliés. Cela "constitue le plus grand mouvement d'expulsion d'agents russes de l'histoire", s'est réjoui le chef de la diplomatie britannique Boris Johnson, tandis que la Première ministre Theresa May a estimé que la Russie était ainsi avertie qu'elle ne peut plus "bafouer le droit international".
L'empoisonnement de l'ex-agent double russe le 4 mars à Salisbury a provoqué une grave crise diplomatique entre Moscou et Londres, qui l'attribue aux autorités russes.
Le président américain s'était jusqu'ici montré moins catégorique. Son appel à Vladimir Poutine pour le féliciter de sa réélection, la semaine dernière, a même été critiqué aux Etats-Unis car Donald Trump avait évité ce sujet délicat, préférant évoquer l'organisation d'une rencontre pour désamorcer des tensions sans précédent depuis la Guerre froide, notamment autour de l'Ukraine et du conflit syrien.
"Bien s'entendre avec la Russie (et d'autres) est une bonne chose, pas une mauvaise chose", avait dû se justifier le milliardaire républicain, dont la promesse de rapprochement avec Moscou s'est heurtée depuis son arrivée à la Maison Blanche début 2017 à l'enquête sur des accusations d'ingérence russe dans son élection et sur des soupçons de collusion entre son équipe de campagne et le Kremlin. "Ils peuvent nous aider à résoudre des problèmes avec la Corée du Nord, la Syrie, l'Ukraine, le groupe Etat islamique, l'Iran, et même la course aux armements à venir", avait-il estimé.
Mais les élus du Congrès des deux bords, qui ne cessent de faire pression pour que l'administration durcisse le ton, semblent avoir eu raison de ses réticences.
"Nous prenons ces mesures pour démontrer notre solidarité indéfectible avec le Royaume-Uni, et pour imposer à la Russie de sérieuses conséquences pour ses violations continuelles des normes internationales", a expliqué le département d'Etat américain, qui a également ordonné la fermeture du consulat russe à Seattle, sur la côte ouest des Etats-Unis, en raison notamment de la proximité d'une base de sous-marins.
L'annonce a été "applaudie" par un ex-ambassadeur américain à Moscou sous la présidence du démocrate Barack Obama, Michael McFaul. L'ex-diplomate Nicholas Burns, qui a servi sous le républicain George W. Bush mais se montre souvent critique contre Donald Trump, a aussi salué une "bonne décision", tout en déplorant qu'elle n'ait pas été annoncée en personne par le président américain, pour l'instant muet sur ce sujet lundi.
L'administration Obama avait expulsé 35 agents russes en décembre 2016 pour punir Moscou de son ingérence dans la présidentielle américaine, juste avant l'arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche. Dans un premier temps, Vladimir Poutine avait choisi de ne pas riposter, laissant sa chance au nouveau président américain, mais devant l'absence d'embellie dans les relations, la guerre des sanctions avait été relancée à l'été.
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