Après avoir écrasé sous un déluge de feu la Ghouta dans le cadre d'une offensive qui a permis au régime de reprendre plus de 90% des territoires insurgés, le pouvoir de Bachar al-Assad a imposé des accords d'évacuation parrainés par son allié russe.
Au moins 28 bus ont été acheminés lundi à Arbine, pour poursuivre les évacuations dans la poche rebelle du sud de la Ghouta, tenue par la faction islamiste Faylaq al-Rahmane. Quelque 1.800 personnes, dont environ 400 combattants, avaient déjà pris place à bord, selon l'agence officielle Sana.
Samedi et dimanche déjà, quelque 6.400 personnes, combattants accompagnés de leurs familles mais aussi d'autres civils, étaient parties en direction de la province d'Idleb, la dernière à échapper presque entièrement au contrôle du régime, dans le nord-ouest du pays. Il s'agissait de la plus importante opération depuis le début des évacuations dans la Ghouta orientale.
"Comment accepter de vivre avec ceux qui ont massacré ma famille et mes amis? Qui ont détruit mon avenir?", a témoigné dimanche Hamza Abbas, avant d'être évacué.
Un soldat russe avait pris place dans chacun des 81 bus transportant les évacués, a constaté un correspondant de l'AFP. Un signe de la très forte implication de Moscou dans l'offensive et les négociations qui en découlent, tandis que la Russie, allié indéfectible du régime, est le principal garant de l'application des accords conclus.
Divergences rebelles
Des centaines de personnes venues à bord de leurs voitures personnelles attendaient lundi l'arrivée de ce convoi à Qalaat al-Madiq, dans la province centrale de Hama, une escale coutumière sur la route vers Idleb. Des organisations au service des enfants étaient également présentes en nombre, a constaté un correspondant de l'AFP.
L'opération risque de durer, alors que des milliers attendent toujours de partir, selon le porte-parole de Faylaq al-Rahmane, Waël Alwane.
Avec l'offensive lancée par le régime le 18 février, les derniers territoires insurgés ont été mis à genoux. Plus de 1.600 civils ont été tués dans les raids aériens et tirs d'artillerie, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
Lorsque les évacuations massives seront terminées, les rebelles ne seront plus présents que dans une seule poche dans la Ghouta, autour de Douma, la plus grande ville du secteur, tenue par Jaich al-Islam, groupe islamiste qui a entamé des négociations avec l'allié russe.
Selon l'OSDH, contrairement aux accords conclus jusque-là dans la région, les pourparlers pourraient aboutir au maintien à Douma de ce groupe en échange de son désarmement, avec le déploiement de la police militaire russe, le retour des institutions du régime et des services de base (eau, électricité), mais sans que l'armée syrienne n'y pénètre.
Mais d'après le directeur de l'OSDH Rami Abdel Rahmane, les négociations sont retardées par des divergences au sein des rebelles.
Parmi les dirigeants de Jaich al-Islam, "certains sont opposés à un accord. La mort avant-hier (samedi) de cinq soldats syriens tués par des francs-tireurs serait liée à des tentatives de sabotage par le camp le plus radical", a-t-il souligné.
"Les négociations en cours sont destinées à assurer notre maintien et non notre sortie", a insisté de son côté le porte-parole de Jaich al-Islam, Hamza Bayrakdar.
'Dénuement total'
Pour le quotidien pro-étatique Al-Watan, une "entente préliminaire" a été trouvée après des "négociations intensives", les deux parties se donnant trois jours pour étudier les termes de l'accord.
Le sort de la population, qui aurait doublée avec l'afflux de déplacés pour atteindre 200.000 personnes, reste suspendu à celui des pourparlers. Plongés dans l'incertitude, 16.000 habitants ont déjà choisi l'exode vers les zones contrôlées par le régime au cours des six derniers jours, selon l'OSDH.
"Je pars parce que je suis malade, mais aussi parce que nous vivions dans une situation de dénuement total, nous avons faim", a témoigné à l'AFP Fayez Ali Thaljé, 53 ans, au moment de quitter Douma.
En une dizaine de jours, près de 110.000 civils ont déjà fui les combats dans la Ghouta, via des couloirs mis en place par les autorités syriennes.
Le gouvernement syrien avait fait en début d'année une priorité de la reconquête de cet ancien verger de la capitale, une des premières régions où se sont déroulées des manifestations contre le régime en 2011.
Depuis leurs positions, les rebelles tiraient régulièrement obus et roquettes meurtriers sur Damas.
La guerre en Syrie a fait depuis 2011 plus de 350.000 morts et conduit des millions de personnes à l'exil.
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