Le théologien suisse a été mis en examen début février pour viols en France, dont l'un sur personne vulnérable, après les plaintes de deux femmes fin octobre qui ont débouché sur une information judiciaire. Il conteste ces accusations.
Début mars, une troisième femme a porté plainte, affirmant avoir subi de multiples viols entre 2013 et 2014 en France, à Bruxelles et à Londres.
Toutes ont décrit des rapports sexuels d'une grande violence et pratiqués sous la contrainte. L'une de ces trois femmes, désignée sous le pseudonyme de Christelle, affirme avoir été violée l'après-midi du 9 octobre 2009 à Lyon, en marge d'une conférence.
En réponse, les premiers avocats de M. Ramadan, qui se sont retirés lundi du dossier, avaient alors produit une note mentionnant une réservation de billet d'avion pour une arrivée à Lyon à 18H35 le même jour en provenance de Londres sur la compagnie British Airways.
Au cours d'une audition, l'actuel président de l'Union des jeunes musulmans (UJM), l'association qui a organisé une conférence à laquelle M. Ramadan participait le 9 octobre 2009, a cependant contredit cette version, selon des documents dont l'AFP a eu connaissance dimanche et révélés par le JDD.
"Il était prévu que monsieur Ramadan arrive au Terminal 1 de l'aéroport de Saint-Exupéry le 9 octobre 2009 à 11H15. Moi-même et un collègue (...) avons récupéré monsieur Ramadan vers 11H35-11H40 à l'intérieur de l'aéroport", a affirmé aux enquêteurs Yassine Djemal, à l'époque responsable des séminaires à l'UJM.
Il a ajouté qu'ils avaient déposé le théologien musulman à l'hôtel Hilton, où les faits décrits par "Christelle" se seraient produits, "aux alentours de 12H15". Ce témoin précise que, dans son souvenir, il lui semble que le théologien arrivait d'Espagne.
Les enquêteurs ont également établi que Tariq Ramadan n'avait effectivement pas pris un billet d'avion de British Airways pour se rendre à Lyon le 9 octobre 2009, selon ces mêmes documents. Il a en revanche bien emprunté cette compagnie pour quitter Lyon le 11 octobre à destination de Londres.
"C'est un non-sujet. Quand on interroge quelqu'un sur un agenda d'il y pratiquement neuf ans, il peut y avoir des oublis. Ca ne change rien au fait que cette femme raconte des choses invraisemblables sur le fond", a réagi auprès de l'AFP Me Emmanuel Marsigny, qui assure depuis peu la défense de M. Ramadan.
"Faillite d'un système"
"On ne peut plus croire Tariq Ramadan. C'est la faillite pas seulement d'un système de défense mais aussi d'un système de vie à mille lieues de toute vérité. Tout n'était que mensonges, artifices et abus", a pour sa part affirmé à l'AFP Me Eric Morain, l'avocat de Christelle.
Autre élément au cœur du dossier: l'état de santé du théologien.
M. Ramadan affirme qu'il n'est pas compatible avec son incarcération, car il souffre de deux maladies, à savoir une sclérose en plaques et une neuropathie (affection de nerfs moteurs et sensitifs, et de nerfs du système nerveux).
Face aux enquêteurs, sa femme et son ancienne assistante ont confirmé ses dires. La première a décrit divers symptômes dont "des douleurs et des fourmillements dans les membres inférieurs" et assuré qu'il prenait un traitement quotidien.
La seconde a pour sa part fait état de sa sclérose en plaques, diagnostiquée "depuis deux ou trois ans" et qui le "faisait souffrir de plus en plus", selon les documents dont a eu connaissance l'AFP.
Une nouvelle expertise, qui doit être rendue au plus tard le 15 avril, a été demandée par le juge d'instruction.
Une première expertise avait été réalisée dans l'urgence mi-février par un autre expert à la demande de la cour d'appel de Paris afin qu'elle puisse statuer sur le recours de M. Ramadan contre son placement en détention provisoire.
Elle avait conclu que la santé de l'islamologue de 55 ans n'était pas contraire à son maintien sous écrou.
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