L'enquête sur la mort le 10 août 2017 de Kim Wall dans le huis clos du Nautilus, le sous-marin construit de toute pièces par Peter Madsen, a fait émerger un faisceau d'indices accablants et concordants validant, selon l'accusation, le scénario du crime qu'elle défend.
Les preuves matérielles manquent dans cette affaire hors norme dans laquelle le procureur, faute d'éléments irréfutables à même de démontrer le meurtre, et a fortiori sa préméditation, semble condamné à démontrer l'impossibilité de la thèse accidentelle défendue par Peter Madsen.
L'autopsie du corps démembré et dégradé par un long séjour dans l'eau de la journaliste suédoise n'a pas permis de déterminer les causes de sa mort mais deux options sont mises en avant à partir de l'examen des poumons: l'étouffement ou l'égorgement.
"Les voies respiratoires ont pu être totalement ou partiellement coupées. Cela serait dû à un étranglement, un égorgement ou une noyade", a indiqué le médecin légiste Christina Jacobsen, de l'Institut médico-légal de Copenhague, après avoir passé en revue les multiples plaies relevées sur le cadavre de la journaliste (tête, torse, organes génitaux).
L'experte agrémente néanmoins ses explications des plus grands doutes, compte tenu de l'état du corps.
"Aucun signe de gaz"
"Quels sont les autres signes typiques justifiant une mort par strangulation?", demande l'avocate de Madsen, Betina Hald Engmark, à Christina Jacobsen.
"Accumulation de sang dans les yeux et dans le visage en général, abrasions au cou", répond l'experte.
"En a-t-on trouvé?"
"Non", répond Jacobsen.
Jugé pour le meurtre avec préméditation de la journaliste de 30 ans, venue l'interviewer dans son sous-marin, Madsen, 47 ans, a affirmé à l'ouverture de son procès qu'elle avait succombé à des gaz toxiques libérés lors d'une soudaine dépressurisation de l'habitacle.
Mais les rapports médico-légaux ne semblent pas corroborer cette explication.
L'un d'eux, daté du 27 octobre, cité par le procureur, indique qu "il n'y a aucun signe de gaz dans les tissus". Ils "ont pu disparaître", tempèrent néanmoins les experts. "S'il y avait des gaz, il y aurait des blessures causées par la chaleur dans le système respiratoire", renchérit Christina Jacobsen.
Le petit ami de Kim Wall a raconté jeudi à la barre que sa compagne "avait peur de voyager à bord d'un sous-marin" mais avait surmonté sa peur car elle était "fascinée par les gens impliquées dans quelque chose".
Vidéos violentes
Schémas à l'appui, le procureur cherche aussi à savoir si les dizaines de coups portés à l'aide d'instruments divers, dont un tournevis de 50 cm de long, l'ont été du vivant de la victime.
Selon la médecin légiste, "le niveau d'accumulation de sang indique que [les coups] ont eu lieu au moment où le sang circulait encore ou juste après".
Peter Madsen a expliqué mercredi avoir percé le corps pour éviter la formation de gaz après la mort, ce qui l'aurait fait remonter à la surface.
Mais pour Christina Jacobsen, l'explication ne tient pas: "les coups de couteau sont superficiels, les gaz n'auraient pas pu entrer ou sortir".
L'accusation soutient que l'accusé a torturé et tué la journaliste afin de satisfaire un fantasme sexuel. Lui a reconnu l'avoir démembrée et avoir jeté son corps à la mer mais dément l'avoir tuée.
Une scie à bois retrouvée en mer aurait pu servir à découper le cadavre.
Un témoin, ancien stagiaire dans l'atelier de Madsen, a indiqué jeudi à la barre que cette scie "n'avait rien à faire" dans le submersible.
La cour a visionné mercredi plusieurs films violents retrouvés sur le disque dur de son ordinateur: deux dessins animés montraient des femmes égorgées, empalées et décapitées. Des textes sur des femmes empalées ont aussi été retrouvés.
Peter Madsen doit à nouveau témoigner le 28 mars. 35 témoins sont attendus d'ici là.
Le verdict est attendu le 25 avril. Le parquet a requis la prison à vie.
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