Jugé depuis le 8 mars pour le meurtre dans son sous-marin de Kim Wall venue l'interviewer le 10 août 2017, Peter Madsen, 47 ans, a affirmé à l'ouverture de son procès que la jeune femme avait succombé à des gaz toxiques libérés lors d'une soudaine dépressurisation de l'habitacle.
Arrêté le 11 août alors que son sous-marin était en train de sombrer - sabordé par lui selon l'accusation - Peter Madsen a reconnu à l'audience avoir décapité, démembré et jeté en mer le corps de la journaliste. Mais il nie l'avoir violentée, agressée sexuellement et tuée intentionnellement.
Pour le moment, ni ses explications, changeantes, ni l'autopsie, n'ont permis de déterminer la cause et les circonstances du décès: comment est morte Kim Wall? Pourquoi n'a-t-il pas appelé les secours? Pourquoi a-t-il lesté le corps de la jeune femme? C'est tout l'enjeu du procès.
A l'ouverture des débats, Madsen avait raconté à la cour que dans la soirée du 10 août, une soudaine chute de pression d'air avait créé un phénomène d'aspiration qui a fait tomber le panneau de l'écoutille, piégeant Kim Wall dans le sous-marin qui s'est rempli d'échappements toxiques alors que lui se trouvait sur le pont.
Mais l'autopsie ne semble pas corroborer l'explication de Peter Madsen. Selon le parquet, Kim Wall a été ligotée, battue, puis étranglée ou égorgée.
Quatorze blessures ante mortem ont aussi été identifiées dans et autour de ses parties génitales, un élement "important" pour le verdict, selon Henrik Stevnsborg, professeur de droit à l'Université de Copenhague, interrogé par l'AFP.
Accident ou préméditation
L'accusation devrait longuement revenir mercredi sur les circonstances de l'accident telles que Peter Madsen les décrit, mais aussi sur ces mutilations sexuelles établies par l'autopsie et qui cadre difficilement avec sa ligne de défense.
Ensuite 35 experts et témoins se succéderont devant le tribunal pour valider ou démonter sa version, et tenter de comprendre le profil de celui que l'analyse psychologique fait ressortir comme "pervers polymorphe et sexuellement déviant", présentant des "traits psychopathiques".
Peter Madsen soutient avoir modifié ses explications à plusieurs reprises pour "épargner" aux proches de la jeune femme les circonstances "terribles" de sa mort, qu'invariablement il assure fortuite.
Citée comme experte, Mme Ditte Dyreborg, officier de la Marine danoise réputée comme une des meilleures spécialistes des sous-marins, devrait remettre en cause la thèse de l'accident, selon un document consulté par les médias danois.
Peter Madsen a expliqué qu'une fois ouvert le panneau de l'écoutille, une vague d'air toxique et incandescent l'avait empêché de porter immédiatement de l'aide à Kim Wall. Or un tel phénomène, affirment des experts, aurait dû "marquer" le corps de la jeune femme, lequel n'en porte pourtant pas trace selon eux.
Scie à bois et vidéos de décapitation
Selon l'acte d'accusation, Madsen a décapité, mutilé, démembré et lesté de pièces de métal le corps de Kim Wall retrouvé après sa disparition en plusieurs endroits. Une scie à bois a été retrouvée elle aussi en mer et aurait pu servir à découper le cadavre.
Des témoins, dont plusieurs ex-liaisons invitées à s'exprimer, décrivent un homme nourrissant de multiples perversions sexuelles, adepte de scénarios sado-masochistes, pratiquant des simulacres d'étranglement.
Dans la matinée du 10 août, quelques heures avant le drame, Madsen avait fait des recherches sur des décapitations de femmes. Le 26 juillet, il avait également recherché des "décapitations de femmes" et a regardé des vidéos.
Pour le procureur, ces recherches - entre autres éléments - signent la préméditation.
"Ce n'est pas sexuel. Je regarde ces vidéos pour pleurer et éprouver des émotions", a assuré Peter Madsen à l'audience, en présence des parents de Kim Wall, journaliste indépendante formée à l'université Columbia de New York.
Le verdict est attendu le 25 avril. Le parquet a requis la prison à vie, synonyme d'une peine d'enfermement de 16 ans en moyenne au Danemark. Comme le code pénal danois le permet, il a également requis une mesure de rétention de sûreté alternative qui permet de maintenir un condamné entre quatre murs tant qu'il est jugé dangereux.
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