Au lendemain du premier tour de la législative partielle organisée malgré les blocages et les appels au boycott, et qui a vu la qualification des deux finalistes du scrutin de juin avec une abstention de 70%, les Mahorais étaient toujours bloqués par des barrages, installés depuis un mois aux points stratégiques de l'ile.
Selon la gendarmerie, une douzaine de points de blocage étaient toujours comptabilisés.
Des opérations de lutte contre l'insécurité et l'immigration clandestine ont encore été menées dans la journée, après celles de jeudi et vendredi, dans le cadre des engagements pris par la ministre des Outre-mer Annick Girardin lors de sa venue il y a une semaine.
Par ailleurs, des habitants commencent à porter plainte pour "entrave à la liberté de circulation", a indiqué la gendarmerie.
Sous couvert d'anonymat, plusieurs Mahorais rencontrés par l'AFP commençaient à manifester une certaine exaspération, mais l'intersyndicale et le collectif ont annoncé que les barrages allaient se renforcer et le mouvement se "durcir".
"Dans certains barrages", assure Anli Rigotard (CFDT), membre du collectif, "il n'est plus possible de négocier avec les mamans (femmes)… Les mamans, elles sont là et elles ont dit qu'elles ne mangeront pas s'il le faut, mais elles vont tenir. C'est pour ça qu'à partir d'aujourd'hui, le mouvement va monter encore d'un ton et il faut s'attendre à pire".
"Ce que nous relayons, c'est la demande de la population", assure Salim Nahouda (CGT), également membre du collectif.
Ils réclament "l'arrivée d'une mission mandatée par le Premier ministre" pour entamer des négociations en vue de "la conclusion d'un accord sur un engagement de toutes les demandes qui ont été faites", a-t-il expliqué.
"minimiser les passages"
"La décision qui a été prise, c'est qu'à l'exception des voitures d'urgence et de secours, plus personne ne passe", a-t-il souligné. De même, la livraison de produits alimentaires sera arrêtée. "On ne peut pas privilégier un secteur d'activité, ni favoriser les gros (distributeurs, ndlr) par rapport aux petits", ajoute M. Nahouda.
"Les véhicules des urgences, on essaie au mieux de les faire passer", tout comme les personnes à mobilité réduite, les personnes fatiguées ou les personnes âgées, par exemple, "mais on essaie vraiment de minimiser les passages", a ajouté Anli Rigotard.
Pour lui, "nous n'avons pas d'autre moyen de pression si ce n'est mettre le feu ou faire les barrages… Donc, on opte pour les barrages", ajoute-t-il, déplorant que "le gouvernement nous laisse exprès nous user et nous prendre la tête entre nous".
Pour M. Nahouda, "l'objectif n'est pas de tuer Mayotte mais d'attirer l'attention du Premier ministre". Edouard Philippe a écrit lundi aux élus de l'ile pour les inciter à contribuer à l'élaboration d'une "méthode" visant à répondre à la crise.
Le syndicaliste assure que l'ensemble de l'intersyndicale "refuse" les opérations d'expulsion de personnes présumées clandestines, qui ont été menées ces derniers jours notamment dans le nord, par un collectif d'habitants. "Le collectif du nord n'a rien à voir avec le mouvement", dit-il.
A Paris, Annick Girardin a dénoncé les "risques d'affrontements entre les communautés". "C'est inadmissible, on est dans un Etat de droit", a-t-elle ajouté.
Elle a écrit samedi aux élus pour récapituler les mesures déjà annoncées par le gouvernement et se réjouir que les élus aient accepté "les discussions proposées, par le biais de personnes missionnées, sur les sujets de fond qui conditionnent l'avenir de Mayotte".
Mais, pour le collectif et l'intersyndicale, "on ne peut plus discuter avec les élus", il y a clairement scission" depuis que ces derniers ont déclaré samedi vouloir "reprendre en main le mouvement", dit M. Nahouda. "Les élus ont tué Mayotte", renchérit Anli Rigotard.
Pour le député LR Mansour Kamardine, "la confiance entre les acteurs locaux et le gouvernement ne tient qu'à un fil, celui du rythme et de l'ampleur des décisions nationales".
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