Le rapport annuel de l'Observatoire de la déontologie du journalisme (ODI), présenté jeudi aux Assises du journalisme à Tours, relève que cette élection "a été émaillée d'incidents entre hommes politiques et journalistes, les premiers cherchant de plus en plus à se passer des seconds pour diffuser leurs messages formatés à leur seule convenance, ou se livrant à un média bashing pour se dégager d'informations les mettant en cause ou ne leur convenant pas, au risque d'affaiblir la démocratie dont la liberté d'informer et d'être informé est un des piliers".
L'organisme qui réunit des particuliers, des professionnels et des médias, évoque notamment la décision du FN durant la campagne de priver certains journalistes d'accès à ses événements, ou de leur interdire d'interviewer les militants lors d'un meeting.
L'ODI, qui rappelle les multiples attaques de Marine Le Pen contre les médias, souligne que le "média bashing" a aussi été le fait d'autres formations politiques, remarquant par exemple que "des journalistes ont été hués lors de réunions de François Fillon. Certains ont failli être molestés. D'autres ont reçu des menaces de mort", sans que le candidat LR condamne ces faits.
Il note en outre "la généralisation de la fourniture d'images sur mesure par les partis politiques à l'occasion de leurs meetings".
"Le plus préoccupant est sans doute que ces tendances se soient prolongées une fois la fièvre des scrutins retombée", souligne l'ODI, qui revient également dans son rapport sur les polémiques à propos de la communication présidentielle ou le "coup de fil" de l'ex-Garde des Sceaux François Bayrou à Radio France pour critiquer une enquête sur le MoDem.
Déontologie
L'Observatoire se penche aussi sur le phénomène des procédures-bâillons, et relève les nombreuses "plaintes et menaces de plaintes (...) déposées ou annoncées pour tenter d'intimider des journalistes jugés trop curieux", notamment de la part d'entreprises comme le groupe Bolloré ou le géant laitier Lactalis, mais aussi, fait nouveau, de la part "du gouvernement et de l'Elysée".
L'étude ne dédouane pas pour autant la presse, notant globalement "un relâchement de la rigueur sous l'influence de débats publics virulents et très polarisés" et une fréquente confusion entre "les faits et les opinions", ainsi qu'entre "animateur, chroniqueur invité et journaliste", ce qui contribue, note l'ODI, à "nourrir l'accusation de parti pris systématique, de mensonges, de manipulation portée contre les médias".
L'ODI défend en outre dans son rapport l'idée d'instaurer une instance indépendante chargée de veiller au respect de la déontologie journalistique, une proposition qui fait figure de serpent de mer et est loin de faire l'unanimité dans la profession.
Cet organe tripartite (il accueillerait des représentants des journalistes, des entreprises de presse et du grand public) n'aurait pas de "pouvoir de sanctionner" mais contribuerait à réguler la profession en exerçant un "rôle pédagogique".
Il pointerait les dérives et encouragerait les bonnes pratiques, défend l'ODI, qui souligne que 30 des 47 pays membres du Conseil de l'Europe sont déjà dotés d'une telle instance, dont près des deux tiers des Etats de l'UE.
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