Au bout de cinq heures de négociations avec la ministre des Outre-mer Annick Girardin, l'un des porte-parole du mouvement social a salué mardi soir "des avancées réelles". "Le plan de lutte contre l'insécurité est acté", a dit ce porte-parole, Fatihou Ibrahime, à la sortie des négociations à Dzaoudzi, la préfecture du 101e département français.
'Remettre plus d'Etat'
"Nous avons demandé 15 mesures d'urgence supplémentaires, la ministre s'est engagée à remettre plus d'Etat sur le territoire", a-t-il ajouté.
"Nous allons rassembler demain (mercredi) la population place de la République" au chef-lieu Mamoudzou, "ils seront les seuls à décider, nous allons proposer cela et voir avec eux s'ils voient favorablement la levée des barrages", au moins pendant un mois.
"Je souhaite le retour au calme dans le territoire le plus vite possible puisque nous avons devant nous un court mois de travail", a dit de son côté Mme Girardin, sortie en pleine nuit de ces pourparlers.
Au bout de ce délai, seront évalués par le gouvernement et l'intersyndicale les travaux engagés par trois "missionnaires" ayant accompagné la ministre dans ce voyage : Jean-Jacques Brot, ancien préfet de Mayotte, le général Lucas Lambert, directeur de la gendarmerie de l'Outre-mer et Jean Courtial, conseiller d'État.
Dans l'entourage de la ministre, repartie de Mayotte mardi soir afin d'assister au Conseil des ministres à Paris mercredi, on évoquait "un accord de principe pour une nouvelle méthode, des mesures pour la sécurité et mieux d'Etat".
"Nous espérons que l'Etat n'est pas en train de nous mener en bateau", a dit de son côté M. Ibrahime, "c'est un travail qui est fait sur la base de la confiance, nous allons juger pendant un mois", a-t-il dit, estimant qu'"il faut qu'on se donne le temps de restaurer la confiance".
Avant ces négociations, plusieurs milliers de personnes avaient manifesté à Mamoudzou contre l'insécurité et l'immigration clandestine en provenance des Comores, à 70 km de là, mais aussi pour réclamer davantage d'actions de l'Etat.
"On est là pour crier notre colère. A partir d'aujourd'hui, nous allons défier le gouvernement", a lancé en début de manifestation un porte-parole du collectif.
"Non à la conférence, oui aux actions", pouvait-on lire sur certaines banderoles en référence à la conférence sur l'avenir de Mayotte proposée par la ministre la semaine dernière.
Extraterritorialité
"Je suis là pour la sécurité principalement, et pour tous les problèmes sociaux", a expliqué à l'AFP Lisa, enseignante de 26 ans, énumérant le manque d'écoles et de lits à l'hôpital. "Que les clandestins retournent à Anjouan ou en métropole !", hurlait une autre manifestante, qui a refusé de donner son nom.
Dans le même temps, entre 200 à 300 manifestants ont investi le conseil départemental pour dénoncer la "trahison" de certains élus qui avaient accepté la veille de discuter avec la ministre, à Dzaoudzi.
La ministre avait annoncé une série de mesures dès son arrivée lundi, et ouvert le chantier, qui fait débat, d'un possible statut d'extraterritorialité pour l'hôpital, dont la maternité est la première de France avec quelque 10.000 naissances chaque année.
L'objectif est d'enrayer la multiplication de naissances d'enfants de mères venues des Comores voisines et en situation irrégulière, ce qui est perçu comme un abus du droit du sol.
"En 2015, plus d'un adulte sur deux vivant à Mayotte n'y est pas né", et les natifs des Comores "représentent 42% de la population du département", selon l'Insee.
Dans Le Parisien de mercredi, l'ancien ministre des Outre-mer Yves Jégo ne voit pas "sur quelle base juridique cette extraterritorialité pourrait marcher".
Mayotte est secouée depuis mardi 20 février par un mouvement de contestation populaire prenant de multiples formes : manifestations, opération escargot et "île morte", blocage de la liaison maritime entre Grande-Terre et Petite-Terre et barrages routiers.
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