Alors que la contestation entre dans sa quatrième semaine, la ministre des Outre-mer Annick Girardin doit rencontrer à 14H00 (12H00 heure de Paris) des élus mais aussi l'intersyndicale et le collectif initiateurs du mouvement, qui critiquent sa légitimité: ils ont refusé de la rencontrer lundi à son arrivée dans l'île, pour la rentrée des classes, dénonçant notamment une "mascarade" et un manque de volonté du gouvernement "de mener de véritables négociations sur (leurs) revendications".
Dans la matinée de mardi, plusieurs milliers de personnes ont manifesté à Mamoudzou, chef-lieu de Mayotte, contre l'insécurité et l'immigration clandestine en provenance des Comores, à 70 km de là, mais aussi pour réclamer davantage d'actions de l'Etat.
"On est là pour crier notre colère. A partir d'aujourd'hui, nous allons défier le gouvernement", a lancé en début de manifestation un porte-parole du collectif.
"Non à la conférence, oui aux actions", pouvait-on lire sur certaines banderoles en référence à la conférence sur l'avenir de Mayotte proposée par la ministre la semaine dernière.
"Je suis là pour la sécurité principalement, et pour tous les problèmes sociaux", a expliqué à l'AFP Lisa, enseignante de 26 ans, énumérant le manque d'écoles et de lits à l'hôpital. "Que les clandestins retournent à Anjouan ou en métropole !", hurlait une autre manifestante, qui a refusé de donner son nom.
Dans le même temps, entre 200 à 300 manifestants ont investi le conseil départemental, notamment pour dénoncer la "trahison" de certains élus qui avaient accepté la veille de discuter avec la ministre, à Dzaoudzi.
En milieu de journée, l'intersyndicale, échaudée, discutait encore dans l'hémicycle avec les élus pour savoir si elle participerait à la rencontre programmée avec la ministre, a constaté une journaliste de l'AFP.
Annick Girardin "a toute la légitimité et toute latitude pour intervenir", avait fait valoir un peu plus tôt sur France 2 le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux en appelant toutes les parties à "beaucoup de responsabilité" et en assurant que l'Etat veut engager "un travail de long terme" avec les élus locaux, les syndicats et les acteurs économiques de l'île.
"Le 101e département français reste Mayotte, Mayotte reste un département français", a martelé lundi la ministre, énumérant les efforts faits en matière d'effectifs de sécurité et annonçant des meures supplémentaires contre l'immigration clandestine.
Surtout, elle a ouvert le chantier d'un possible statut d'extraterritorialité pour l'hôpital, dont la maternité est la première de France avec quelque 10.000 naissances chaque année.
"Maternité internationale"
L'objectif est d'enrayer la multiplication de naissances d'enfants de mères venues des Comores voisines et en situation irrégulière, ce qui est perçu comme un abus du droit du sol.
"En 2015, plus d'un adulte sur deux vivant à Mayotte n'y est pas né", et les natifs des Comores "représentent 42% de la population du département", selon l'Insee.
Avec ce statut, la maternité serait "en quelque sorte une maternité internationale", mais le droit du sol ne serait pas remis en cause, explique le député En Marche Aurélien Taché dans La Croix: "au lieu d'obtenir automatiquement la nationalité française", les enfants de femmes comoriennes qui y naîtraient "pourraient être déclarés comme Comoriens au registre de l'état civil".
Le sujet, un des noeuds de la crise à Mayotte, fait débat: en déplacement dans l'île, le président des Républicains Laurent Wauquiez s'en est emparé début mars en estimant que "quand un enfant naît ici de deux parents clandestins, il ne doit pas pouvoir être français."
L'ex-ministre des Outre-mer et députée de la Réunion (Nouvelle gauche) Ericka Bareigts s'étonne elle que "personne ne parle d'investissements aux Comores" et appelle l'Etat à engager un "dialogue diplomatique" avec ce pays pour y construire un hôpital.
Dans ce climat, l'élection législative partielle prévue sur l'île le 18 mars (deuxième tour le 25) est maintenue. Mais les manifestants ont annoncé la couleur: "Chacun va imprimer un bulletin +sécurité du département+ et le mettre dans l'urne", assure l'un d'entre eux.
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